Shaynning
Libraire @ Librairie Monet
Intérêts littéraires : Biographies, Jeunesse, Littérature, Psychologie, Arts, Bande dessinée, Loisirs

Activités de Shaynning

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La porte A-4

Par Naomi Shihab Nye et Enzo
(4,5)
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Incontournable Mars 2024 À l'aéroport international d'Albuquerque , au Nouveau-Mexique, la narratrice ( l'autrice) attend son vol à l'aéroport, quand on demande en urgence une personne pouvant parler l'arabe de se présenter à la porte A4. Ça tombe bien, il s'agit de la sienne. Sur place, elle découvre une femme en pleurs, convaincue que son vol à été annulé, alors qu'il a été en réalité retardé. C'est ce que l'employé de l'aéroport tentait de lui dire et qui incombe maintenant à Naomie de traduire. Quand la femme palestinienne comprend qu'elle pourra faire son voyage comme prévu, elle s'apaise et amorce une conversation avec la narratrice. Partage de biscuits à la pistache, appel au frère de la madame, ce qui devait être une simple mise au point devient le terrain fertile à un partage touchant, et pas seulement pour la narratrice, mais pour les gens autours également. On peut rencontrer des gens formidables vraiment partout et dans toutes sorte de situations, pour un peu qu'on prête attention à notre environnement. Il me semble que dans ce rythme effréné de vie que nous menons actuellement, il soit toujours opportun de nous ramener à ces petits moments pétillants et spontanés tel que celui présenté ici. Et j'aime bien que nous ayons une petite fenêtre culturelle grâce à cette charmante femme vêtue d'une robe qu'on retrouve traditionnellement en Palestine. Aussi, j'apprécie les histoires où la langue est un outil de partage autant que de réconfort: On a généralement un attachement à sa langue et j'imagine assez facilement combien ça du être un soulagement pour cette personne unilingue d'avoir quelqu'un pour traduire dans sa langue. Une anecdote toute simple, petit moment de joie inattendu, marqué par l'entraide, la bienveillance, la générosité et la complicité, sous le crayon toujours sobre et sympathique d'Enzo. Pour un lectorat du premier cycle primaire et plus, 6-7 ans+ ( pour lecture accompagnée) et 2e cycle primaire ( 8-9 ans+) pour lecture seul.e.
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L'écuyer et son chevalier T.1 : L'écuyer et son chevalier, Vol. 1

Par Scott Chantler
(4,0)
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J'ai lu cette BD canadienne sur mon temps de dîner, entre deux bouchées de pudding chômeur et les deux ensemble, ça se déguste assez bien! Un peu à la manière de Dragonland, "L'Écuyer et son chevalier" propose un duo atypique, où l'écuyer n'est pas l'apprenti incapable que leur chevalier respectif veulent bien croire. "Écuyer" et son chevalier arrivent dans une petite bourgade, qui semble à priori abandonnée, en atteste une certaine dévastation du pont, mais en réalité, les habitants craignent la présence d'un dragon, leur "malédiction". Pour l'apaiser, ils lui offrent du bétail, en dépit du fait que les vivres se font rares pour leurs besoins de subsistance. Pour le chevalier, nulles doutes, cette bête écaillée se doit d'être domptée et ni un ni deux, le voici cavalant vers le repaire du dragon, qui a élu domicile dans la tour de l'ancien magicien du village. le jeune écuyer attend de puis deux jours déjà et le temps est bien long. Il entreprend alors de trouver une solution à la "malédiction" du village en consultant la bibliothèque. Sans le savoir, le jeune homme vient se lancer dans une réelle enquête, qui ne place pas le dragon au centre de tous les problèmes. Nous sommes dans ce type de scénario où celui qui tien normalement le "second rôle" a en réalité le premier. Pendant que son chevalier un peu arrogant se fait emprisonner par le dragon, l'écuyer enquête sur ce qui se passe dans le village et il est n'est pas au bout de ses surprises. La première de toute est qu'il avait raison: le dragon n'est pas le "fléau" derrière les évènements dont sont victimes les villageois. Mais alors, qui ou quoi est derrière la destruction du pont, de l'incendie, du fantôme près du puit? Avec son approche pragmatique, son sens de l'observation et de la déduction, l'écuyer illustre qu'avoir "la tête dans les livres" présente quand même de bons avantages...comme de ne pas tomber dans les conclusions hâtives? Avec ses charmants personnages, ses tons gris, noirs et oranges, et son détective-en-herbe du Moyen-Âge, l'auteur détourne l'univers Héroic Fantasy pour en faire un polar jeunesse pétillant et efficace, avec un dragon dont j'aime beaucoup le côté décalé, qui me rappelle celui de "Le Monde de Pickto", avec leur air un peu "vieux coloc sympathique" pas du tout à l'image du dragon féroce du style de Smaug, dans le Hobbit. D'ailleurs, vous irez voir le cahier de l'auteur à la fin, où il vous explique comment il a élaborer son dragon. Aussi, je ne soulignerai jamais assez l'importance de casser les vieux moules désuets de la virilité masculine, alors en ce sens, ça me plait toujours de voir des jeunes garçons réfléchir, lire et de manière générale, ne pas être couillons. Par ailleurs, il a un petit côté ingénu qui me rappelle un peu Tintin, mais ça lui va bien, après tout il à l'air plutôt jeune. Ça me fait aussi bien rire qu'il s'appelle simplement par son intitulé "Écuyer", comme les personnages du Donjon de Naheulbeuk. Ça illustre l'écart de considération du chevalier pour son écuyer. Dans les petites suggestions que je ferais pour améliorer la BD, je travaillerais les expressions, qui ne sont pas toujours très claires, autant celle des humains que celle du dragon. Heureusement que dans le cas de ce dernier, la gestuelle de ses pattes et de sa queue aide. Bref, j'ai eu bien du plaisir à suivre ce personnage qui, je l'espère gagnera à se faire connaitre, tout en ayant droit à l'une de mes créatures fantastiques préférée, les dragons ( surtout les impertinents amateurs d'humour). J'aime que les auteurs et les autrices sortent des cadres, surtout en jeunesse, plus circonscrits dans ses normes que la littérature générale, je trouve. À voir! Pour un lectorat intermédiaire, à partir du 3e cycle primaire, 10-12 ans ( les 8-9 ans habitués de la lectures peuvent aussi s'y aventurer si la longueur de la BD ne leur fait pas peur).
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Soeur aînée

Par Lily-Belle de de Chollet
(4,0)
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Dans ce nouveau membre de la collection "Court Toujours' aux éditions Nathan, on va traiter de fratrie. Depuis qu'elle a mise en ligne une vidéo humoristique d'une tortue en pâte à modeler parodiant les clichés du cinéma, Tess, une adolescente, connait maintenant un petite succès. Néanmoins, elle se doit maintenant de publier rapidement de nouvelles aventures de sa petite tortue, projet mené conjointement avec son meilleur ami. Quand les deux ados laissent entendre que la prochaine vidéo se déroulera dans un château, ils n'ont pas le choix de garder cette ligne. Heureusement, une certaine fête se tiendra, selon les dires d'une amie, dans le "château" d'une fille populaire. Tess envisage de s'y rendre, mais c'était sans compter sa mère obstétricienne, qui doit aller aider une maman à accoucher ce soir-là. Elle oblige donc son aînée à rester à domicile pour garder sa petite sœur Esmée et son petit frère Oscar ou de les amener avec elle à ladite soirée, qui est de toute façon sans alcool ( Même si, bien sur, il y en aura sans doute un peu). Tess est parée pour une soirée haute en couleur, entre son projet cher à son cœur et sa petite sœur profondément amère à son endroit. Au moins, Oscar est ravi d'enfin sortir avec sa grande sœur. C'était une lecture touchante, crédible et divertissante. J'aime qu'on se soit réellement intéressé à ce fossé entre les deux sœurs, entre la plus vieille qui a besoin de son espace et la plus jeune qui se sent rejetée. J'apprécie qu'on ait travaillé cette façon qu'on a dans les fratrie de se lancer des mots durs sans nuances, mais que dans les faits, il y en ait. Je pense notamment à Esmée, qui traite sa sœur de "débile" alors que Tess la traite de "boulet". La communication est un des grands défis dans les relations interpersonnelles et comme les fratries sont dans notre toute première sphère sociale, la familiale, elle revêt donc une grande importance dans le développement des compétences sociales. En ce sens, apprendre la portée des mots et y apporter des nuances, est quelque chose qu'on apprend forcément à faire dans une fratrie. Et j'ajoute qu'il est très rare de ne pas accorder d'importance à ce que nos frères et sœurs disent, précisément parce qu'on a vécu avec eux. Dans cette histoire, on voit qu'il y a un développement entre les sœurs, qui ont peut-être perdu de vue l'importance de se considérer et même de se porte de l'affection. Étonnant pour un si court roman de réussir à faire progresser une relation comme celle-là, mais il faut dire que le contexte si prête: Il y a certains personnages, dans leur commentaires, qui amènent les sœurs à se voir autrement ou à extrapoler une émotion. Aussi, j'aime que le petit Oscar soit le type de petit frère qui a l'air de trouver sa sœur fantastique, au point de vouloir faire des sorties avec sa grande sœur. S'il a beaucoup d'énergie ( normal il a 9 ans), il a une belle conscience de ce qui est important pour Tess et le fait qu'il se soucis de ce qu'elle pense de lui illustre à quel point son point de vue est important pour lui. Au fond, c'est une fratrie qui s'aime, mais qui a eu du mal à le verbaliser et se le manifester, mais ça, c'est un enjeu assez rependu dans les sphères familiales. Le thème des capsules sur Youtube est aussi intéressant, car ici nous avons l'expression d'une forme artistique. S'il y a bien une chose de positive avec la technologie est la démocratisation des arts et des modes d'expression, qui n'a plus de frontières et ne se limite plus aux élites sociales ou académiques. Ça se lit tout seul, c'est riche en action tout en ayant un fond solide sur le travail des personnages et des enjeux, en dépit du format court. Je réitère que la collection Court Toujours et celles des autres maisons qui ont ce genre de petit format, est tout aussi pertinent que les pavés, en plus de proposer des lectures beaucoup plus accessibles aux ados, incluant les "moins lecteurs" ou ceux et celles qui n'ont pas forcément d'intérêt ou de temps. Une autre belle réussite pour la collection. Pour un lectorat adolescent du premier cycle secondaire, 12-15 ans+
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Ca m'est bien égal

Par Julie Fogliano, Molly Schaar Idle et Juana Martinez-Neal
(4,0)
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Incontournable Album Avril 2024 Il est relativement commun de parler d'amitié dans les albums et les romans jeunesse, mais ici, ce que je trouve particulièrement intéressant, c'est de traiter l'amitié dans son sens large et de nommer ses composantes un peu indirectement. Deux petites filles sont de part et d'autre d'un arbre et elles ont l'air d'être ennuyée de la présence de l'autre. En texte, on démarre les "ça m'est égal que...". Dans les premières pages, elles existent de part et d'autre sans trop se regarder et sans interagir, au gré des "ça m'est égal ce que tu as l'air physiquement" et "ça m'est égal ce que tu penses de mes goûts personnels". Peu à peu, des sourires commencent à poindre, des échanges sont faits et des rires éclatent. "Ça ne m'est pas égal ce que tu ressens et ce que tu souhaites", "ça ne m'est pas égal quand tu te mets en danger" et surtout, "j'aime" tes qualités, tes signes d'affection et je connais tes préférences. "J'aime que tu sois toi et que je sois moi", que nous soyons différentes, mais malgré tout que nous ayons du plaisir et que nous nous complémentons si bien. le livre illustre pleins de beaux moments entre les deux filles et se solde avec "Je tiens vraiment beaucoup à tour cela, j'y tiens vraiment beaucoup". Qu'est-ce que c'est une "amitié"? C'est bien plus qu'un statut qu'on se donne un peu trop spontanément étant enfant, et ce n'est ni quelque chose qu'on peu acheter, ni quelque chose qu'on peut extorquer. L'amitié est inconditionnelle, elle possède plusieurs bases importantes et entre dans les sphères sociales fondamentales. Bien avant d'avoir des relations amoureuses, nous avons des relations amicales, dont les bases sont d'ailleurs les mêmes, le désir sexuel exclut: la confiance, la réciprocité, le plaisir partagé, la communication saine, le partage, le respect, la solidarité, l'affection et les projets communs, tous cela à des degrés variables. Ce n'est donc pas qu'une histoire "d'être camarades de classe" ou encore "copains de sports". L'amitié, c'est quelque chose de précieux et compte tenu de ses nombreuses bases, quelque chose de complexe, qu'on apprend dès l'enfance. L'album présent est une ode à l'amitié dans sa définition.Qu'est-ce qui est futile de ce qui est essentiel. On n'a pas besoin d'aimer le physique de la personne ou encore sa façon de s'habiller, de dessiner ou de chanter. On a pas à juger de ces choses-là, même si bien sur, on peut en discuter. C'est d'ailleurs un critère superficiel que de choisir ses amis en fonction de leur apparence, car ça suppose de passer outre ce qu'ils sont dans leur essence. C,est pourquoi l'album commence par ces "ça m'est égal que" très axés sur le physique ou l'environnement direct ( comme la moustache du papa ou l'odeur des sandwichs du repas du midi). Dans l'autre partie, on traite de ce qui importe, des valeurs et des comportements socio-affectifs donc. On aborde la question de l'empathie, soit de savoir se soucier de ce que ressentent les autres et d'être capable de se mettre à leur place. On articule l'idée de la réciprocité, soit que cette amitié est équitable et équilibrée, elle profite aux deux sans que ce soit au détriment d'une ou de l'autre. Elle est complice aussi, car elles partagent des fous rire, des moments moins joyeux, des jeux comme des discutions. Elles sont capables d'affection dans leurs gestes, que ce soit des câlins ou de se prendre les mains, leur contact est confiant et sincère. Elles aiment que leur différence soit reconnue et célébrée au même titre que leurs ressemblances leur permettent des intérêts et projets communs. Plus que tout, je pense, il y a l'importance dans leur validation d'émotions, qu'elles peuvent vivre entre elle et qui est liée à leur réel souci de l'autre. Je ne réitèrerai jamais assez combien il est fondamental de parler des amitiés et de ce qui s'y rattache, car en complément des apprentissages d'ordre académique, nous devons apprendre à vivre ensemble et se développer au contact de nos pairs, comme les animaux grégaires que nous sommes. Apprendre l'amitié, c'est apprendre à grandir. C'est admettre l'importance de la communication efficace, les compromis, le partage, l'humilité aussi ( on est pas tous seuls, il y a d'autres gens autours de nous). C'est aussi de développer son estime de soi, d'avoir un appui dans les moments difficiles ou les petits tracas quotidiens. Les petites demoiselles ont donc bien raison de dire que tout ça, il faut y tenir vraiment beaucoup. Avoir de belles relations sociales, ne serait qu'avec quelques personnes, c'est un passeport pour la vie. Ni plus, ni moins. Les illustrations sont fort mignonnes et vous remarquerez que la petite fille blonde de gauche, celle avec les bulles bleues, est dessinée différemment de celle de droit, celle avec les bulles jaunes. le trait est plus rond et plus net que celui de droit, dont ont voit les multiples traits superposés et plus d'angles dans les vêtements et le corps. Les deux petites filles ne se touchent pas au début, mais à la fin, elles sont bras dessus, bras dessous, ce qui laisse entendre la collaboration des deux illustratrices sur les derniers dessins tout spécialement. J'ai juste un peu de mal avec le choix d'un bleu si profond pour la petite fille de gauche car les dessins semblent cachés, beaucoup plus qu'avec le jaune, plus subtile et moins visuellement "par dessus" le dessin. J'aurais opté pour un bleu contenant plus d'eau, pour atténué la nuance, on verrait mieux la petite fille. Néanmoins, l'idée des bulles de couleur est un joli symbole, où le bleu et le jaune finissent par s'unir et former une zone verte. Une zone commune. Bref, des beaux dessins au plomb tout doux avec de belles expressions faciales, un très beau message sur l'amitié et ses composantes, accessible et étonnamment bâtit comme "un froid vers un chaud", sans doute un peu comme la relation, qui par de l'indifférence vers la chaleur relationnelle, j'imagine. Un bel ajout aux albums jeunesse, dont j,ai déjà hâte d'en parler aux professeur.e.s. Pour un lectorat préscolaire, 4-5 ans+
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La couleur de ma différence

Par Mc Knoell Alexis
(4,0)
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Incontournable Août 2023 Pour ce nouveau membre de la fratrie Unik couleur de chocolat, de la maison Héritage, on traite de racisme, de différence et d'estime de soi. Pas du racisme radical comme dans certains romans ado scabreux, non, plutôt celui des mots et des préjugés, qui à leur façon, font beaucoup de mal, eux aussi. Notre narrateur est anxieux en ce jour de début de classe. de ce qu'on comprend, il n'a pas eu son mot à dire dans la décision de sa mère de lui faire fréquenter une nouvelle école, qu'on peut deviner plus nantie ou du moins, située dans une zone de la ville plus nantie. Et où notre narrateur à la peau noire se retrouve en minorité très minoritaire dans une populace très caucasienne (Blanche). À travers ses vers libres, le narrateur nous esquisse un parcours scolaire ponctué de remarques déplaisantes et souvent basée sur des jugements ou d'association incorrecte. Je cite par exemple le "Tu parles bien pour un Noir", qui me fait sourciller tout autant que le narrateur. Il est centre de l'attention, se comparant à un pion noir sur un échiquier. Ce qui le nargue, c'est d'être toujours renvoyé à sa différence et que cette même différence est toujours renvoyée à des origines étrangères, alors qu'il est Québecois. Il aimerait qu'on change de sujet tout comme il aimerait pouvoir répondre aux remarques qui alourdissent son esprit. Un jour, la remarque de trop lui fait perdre son sang froid et il répond par la violence. Il se fait exclure cinq jours pour s'être battu. Au-delà de cette humiliation, c'est surtout le trop plein que notre narrateur a le besoin de canaliser. Heureusement Il y a une dimension sociale qui me semble très intéressante dans cette histoire est c'est celle de la minorité visible renvoyée à elle-même dans son entité. On aurait pu avoir le même cas de figure pour une fille dans une écolde composée que de garçons. On aurait pu avoir le même cas de figure avec un ado en chaise roulante ou tout autre handicap physique visible dans une école où personne n'en a. Dans ce genre de contexte, il n'est donc pas rare de voir la personne devenir aux yeux des autres "Le/La différent.e" qui a X différence. On observe alors des renvoies fréquent à cette différence, comme si aux yeux des autres, c'était une "aberration", un genre d'ovnis, un atypique, en oubliant tout ce que cette personne a de commun à eux: des émotions similaires, des intérêts similaires, des besoins similaires. Pour la personne qui le subit, elle a alors l'impression d'incarner la différence en elle-même et c'est bien évident que ça devient lourd, surtout quand il faut supporter les remarques de centaines de curieux épatés ou perplexes. Être une super-minorité dans un monde qui côtoie peu la diversité, c'est pratiquement un fardeau et ça demande donc des facteurs de protections: Un réseau social d'appuis, le concours des profs, une bonne éducation à la diversité et surtout, à l'empathie. Toutes des solutions, de rien, c'est gratuit. J'ai sourit quand j'ai lu le passage sur le prénom. Non pas que cela me fasse rire que son prénom soit écorché, mais cela m'évoque le petit livre sympathique "Je m'appelle Wlodjymyerz", livre que j'ai du écrire moult fois pour arriver à enregistrer le prénom - C'est chose faite, je le connais par coeur! Dans ce livre, Wlodjymyerz ( prononcé "Vlo-dji-mierge") se faisait constamment écorcher son prénom polonais et il y a tout un éventail de pistes de réflexion sur cette question. Les prénoms étrangers ne sont pas seulement donnés aux étrangers. Ils sont parfois ceux des enfants nés dans les pays hôtes. Les "caser" de facto dans la catégorie des "immigrants" ou des étrangers est donc une erreur, tout comme celle de le faire par la couleur de peau. Aussi, la question de la prononciation a été aussi traitée et comme une des professeurs de cette histoire le disait: Un prénom est sacré, c'est un identifiant et souvent une source de fierté donné en l'honneur d'un membre de la famille ou tiré d'un pays dont les membres exilés ou immigrés restent parfois attachés. Franciser ou remodeler un prénom pour en faciliter l'usage est donc litigieux, voir irrespectueux, en ce sens. du reste, depuis quand apprendre des nouveaux mots est-il devenu impossible à faire? On en apprend tous les jours dans notre langue d'usage, est-ce si pénible de le faire pour des prénoms étrangers? le narrateur de "La couleur de ma différence" peut légitimement, à mon avis, se sentir lésé de se faire maltraiter ainsi son nom. Je pense qu'une part revient au professeur de demander et l'autre part à l'étudiant de le fournir. "Faire de sa différence sa fierté" est un des thèmes de cette histoire et ça, je seconde cent fois! Nous avons tous une différence, certains en ont même plusieurs, certains en ont qui ne sont pas visibles. Mais aucune différence, qu'elle relève de la couleur, de l'orientation sexuelle, de l'identité en générale ou du genre ne mérite d'être une source de honte et objet d'ostracisation. Se faire sentir inférieur ou "bizarre" parce qu'on est ce qu'on est est d'une stupidité absolue de la part des gens qui la traite comme telle. D'abord parce que même dans nos différences, nous avons aussi beaucoup de ressemblances. Ensuite, parce que la différence est source de curiosité. Voir autre chose, c'est l'occasion de "voir" autrement, d'articuler autre chose et donc, d'assouplir l'esprit. C'est comme ça qu'on devient tolérant, empathique et ultimement socialement intègre. Mon avis , bien sur. J'ai beaucoup traité des "autres", je m'intéresse maintenant à notre narrateur ( appelons le Mc Knoell, puisque c'est un roman à saveur biographique). Mc Knoell a deux aspects à considérer: Sa gestion de la colère, d'un part, et la construction de ses défenses, d'autre part. Les deux seront abordés. Dans le premier cas, le directeur a raison sur la question de sa réaction violente. Si sa colère est légitime, sa réponse agressive physique l'est beaucoup moins. La violence ne résout rien, elle ne crée que plus de violence et en plus, risque de le faire passer pour quelqu'un de peu recommandable. Toutefois, cet incident se relaie à l'autre point, celui de sa défense. Mc Knoell va donc parler à sa mère des évènements, sanction oblige. Cette maman a de bonnes recommandations. Sommairement, elle recommande à son fils de tabler sur son estime de soi. Socle de notre psychée, l'estime de soi fait des miracles. L'estime de soi, quand elle est solide, permet d'accepter d'échouer et d'être faillible, elle permet d'accepter d'avoir des émotions, elle rend moins susceptible et vulnérable aux violences, elle nous donne la force d'encaisser les critique. Surtout, l'estime de soi permet de reconnaitre ses forces et d'être bienveillant envers soi-même. C'est elle qui permet de refuser d'être maltraité et utilisé. Elle sait ce que la personne vaut. Mc Knoell a donc une bonne estime de soi, mais manque de confiance en soi. Il savait déjà qu'il méritait mieux et il avait raison de croire que tout ce qu'il vit est injuste. Maintenant, avec les conseils de sa maman, à savoir "comment répondre aux gens" et "t'aimer un peu plus", il a de bonnes chances de s'intégrer et d'évoluer sainement. Ce ne sera pas facile, des imbéciles et des ignorants, il y en aura toujours. Par contre, il aura aussi des gens pour le soutenir et pour célébrer sa personne au-delà de sa différence. Ça semble même se profiler vers la fin du livre. J'aime les romans qui, à travers des formules simples, sont à saveur universelle, tout comme j'apprécie les romans qui permettent de se placer dans la peau de gens vivant des situations dans lesquelles on ne peut pas se placer autrement que dans la fiction. "La couleur de ma différence" n'est donc pas simplement une histoire de racisme pour moi, mais bien une fenêtre sur la "différence". Les LGBTQ+, les filles, les Intellos, les artistes, les immigrants, tant de jeunes pourront aussi s'identifier aux constates et aux interrogations soulevées ici. Par ailleurs, les conseils de la mère, bien qu'en apparence simple pour des entités complexes telle que l'estime, restent très pertinents. Il faut d'ailleurs que j'ajoute aimer la présence maternelle de cette histoire. Les parents sont imparfaits, mais nombre d'entre eux veulent soutenir leurs ados sincèrement, on l'oublie souvent dans la littérature adolescente, plus souvent tournées vers les enjeux. Ici, on est dans une source positive, une figure maternelle attentive et solidaire, qui propose des solutions et même des idées de quoi répondre. Ça ma bien fait rire! C'est la page 97, en voici un exemple: " Y a un Blanc à mon école, tu devrais bien t'entendre avec lui." haha Ça sonne aussi absurde qu'en sens inverse, c'est bien trouvé! Il y a un court, mais éloquent passage sur le "profilage racial" qui sévit encore dans certaines professions, comme la police. On parle de profilage racial quand on attribue automatiquement une intention ( souvent malveillante) à un groupe ethnique donné. C'est un des élément qu'on retrouve dans ce qu'on appelle maintenant "le racisme systémique" ( ne pas confondre avec "systématique", c'est pas pareil), c'est-à-dire un racisme internalisé dans un système donné. Se faire interpeller par des policiers parce qu'on a un physique ethnique noire, ou latino ou magrébin, c'est raciste et c'est du profilage racial. Pour la personne qui se fait interpeller avec pour motif son ethnie, c'est humiliant. C'est comme si on mettait tous les gens du groupe ethnique dans le même panier. Ce sont des généralisations dangereuses et surtout, qui ne mènent concrètement nul part. Bref, il y a tout un enjeu sur cette seule thématique qui mérite qu'on la souligne et qu'on en discute. Il y a un Postface de l'auteur, monsieur Mc Knoell Alexis, qui explique l'histoire derrière l'histoire. La sienne. Il relate, entre autres trucs intéressants, un élément que je trouve moi aussi important, en tant qu'individue d'une société interculturelle, mais aussi en tant que libraire jeunesse: La "juste représentation dans la culture". Pour se reconnaitre, les enfants et ados ont besoin devoir la diversité dans leur littérature ( et dans tout le milieu artistique et culturel) . À une époque pas si lointaine, la littérature jeunesse était homogène et particulièrement aseptisée de toute diversité. C'était navrant et surtout, un terrible rappel de la politisation de la littérature jeunesse. Les choses ont changées, un peu. On a plus de personnages de couleur noire, miel, pain doré, toute palette; on a plus de diversité de rôles pour les trois genres ( J' inclut l'inter-genre), ont a plus de personnages en situation de handicap et plus de personnages avec des enjeux de santé mentale. La lutte pour une meilleure représentation n'est pas violente, mais elle est là. Tout ça pour dire que l'auteur a raison de mentionner ce qui semble un détail, mais qui est en réalité un enjeu littéraire avéré. Pour se sentir estimés, les jeunes on besoin de se voir et de s'identifier à des modèles qui leur ressemble, mais pas seulement! Pour comprendre la diversité, les gars doivent lire sur des personnages féminins, les blancs sur des personnages noires, les typiques sur les atypiques. Pour former un tout harmonieux, y a pas de miracle: Faut le "voir" et le comprendre, pour le célébrer par après. Ce n'est pas en s'intéressant seulement aux catégories qui nous concernent qu'on va réellement évoluer. Houla, je me sens d'humeur philosophe ce soir! Enfin, ce roman nous rappelle le poids de nos propres mots. Sans même avoir d'intentions mesquines, parfois, la nature de nos propos ou la récurrence d'un préjugé font du mal. Je pense qu'à défaut de ne plus rien dire pour ne pas blesser, il faudrait surtout être attentifs à ce que nous disons et surtout, aux réactions ou émotions qu'elles suscitent chez la personne qui reçoit nos mots. Cela renvoie naturellement au développement de l'empathie et à l'importance des représentations évoqués antérieurement. Quand on est souvent entouré de diversité, on a tendance à moins s'en étonner et surtout, on se rend compte que nos différences n'empêchent nullement les ressemblances entre nous. Ah, bon sang, moi qui voulait faire court...bah, c'est raté! Ce petit livre, je le constate, nous fait naviguer sur pleins de thèmes intéressants et il y a pleins d'axes sur lesquels extrapoler. Merci à son auteur! Bien qu'il y ait une centaine de pages, il y a une à trois-quatre phrases par pages, c'est donc rapide à lire - Mais pas moins pertinent, attention! C'est le propre de la collection Unik que cette formule très aérée en vers libres. Notez que c'est aussi la singularité de la forme des phrases qui étonne. Des vers arrondies, en flèche, en escalier, en courbe ascendante. Des polices qui grossissent, s'amincissent ou deviennent transparentes; Des mots, plutôt que des phrases. Tout cela respire la créativité et viendra chercher le lecteur sur un aspect autre que le simple texte: celui de la forme symbolique. Leur taille ou leur emplacement est toujours corrélé au texte, ce qui le rend particulièrement dynamique et renforcé. Cela devrait plaire à un plus large spectre de Lecteurs ado, dont les moins amateurs de paragraphes ou les visuels. Enfin, comme il s'agit de vers libres, on traite donc aussi de poésie, dans une forme beaucoup plus accessible et ludique. Cela concerne l'ensemble des membres de la fratrie Unik. Nous avons placé la collection Unik en littérature adolescente ( 12-17 ans), pour qu'ils restent bien ensemble sur le rayon et parce que les sujets sont généralement sensibles. N'empêche que pour les profs des 10-12 ans du groupe de Lecteurs de la littérature Intermédiaire du troisième cycle primaire, ces livres peuvent leur convenir, si vous avez envie de vous lancer dans des enjeux plus sérieux ou si vous avez des Lecteurs matures et/ou sensibles. Je rappelle que les livres n'ont pas réellement d'âge, ce ne sont que des approximations et des lignes directrices. Pour un lectorat adolescent du premier cycle secondaire, 13-15 ans+.
Shaynning a apprécié, commenté et noté ce livre

Les racines du coeur

Par 2Fik et Dorian Danielsen
(4,0)
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Incontournable Poésie Ado Mars 2024 La collection Unik de la maison québécoise Héritage propose un nouveau membre couleur de mandarine pour aborder le thème du déracinement chez les jeunes. Comme tous les membres de la fratrie, "Les racines du coeur" est un mélange entre poésie et fiction, dont les phrases changent de forme, de teinte et de taille pour se mouler à la charge émotive ou encore au verbe d'action, ce qui en fait un texte dynamique au sens littéral. Le narrateur apprend de manière abrupte qu'il va non seulement déménager bientôt, mais également changer de pays. Pour lui, son monde vient d'imploser. Il relate la perte de tous ses repères, les émotions désagréables qui marquent son quotidien et les semaines à se sentir profondément seul et incompris. Avec le temps, à petits pas, il prend ses marques, s'approprie sa chambre et son espace vital, trouve de l'intérêt dans son nouvel environnement communautaire et obtient enfin un premier contact chaleureux avec une autre enfant. Peu à peu, il réalise qu'il n'a plus à craindre les changements de milieu, puisque à ses yeux, il est devenu sa "propre maison". Je dois avouer que dans cette historie touchante, le fait que les parents n'aient rien fait pour préparer leur enfant à autant de changements est vraiment perturbant. Comme si révéler à la dernière minute allait l'aider. Au contraire, sans prendre d'avance et lui permettre de progresser psychologiquement sur les changements à venir, en lui donnant des indices sur ce qui va arriver et amener déjà des éléments culturels propres au pays qu'ils vont intégrer ou tout autre préparations, comment ont-ils pu espérer que leur enfant s’intègre facilement? Son univers a été pulvériser en deux jours, alors qu'ils ne sont pas en contexte de guerre ou de péril! Bon sang, les parents, c'est pas fort! Bon bon, je me calme. Je sympathise avec le personnage. Je pense que dans ce genre de contexte, on peut parler de "processus de deuil", car il semble y avoir la plupart des phases, même si elle ne sont pas nommées. Il y a du déni, il y a la colère, la négociation, la dépression pour aboutir à l'acceptation et la prise en main de la situation. Il y a un processus. Le personnage passe par tout un spectre d'émotions désagréables* ( Pas "négatives", les émotions ont une fonction, elle ne sont donc jamais négatives, par contre elles peuvent être très désagréables) et on peut comprendre que sans repères, hormis ses parents, à quoi peut-il se raccrocher? On se rappelle qu'il s'agit d'un enfant, pas d'un adulte, ses facultés d'adaptation et ses expériences sont limitées. Néanmoins, et là vient le baume sur le bobo: le temps. Et la résilience. Peu à peu, il se trouve des choses à apprécier, il connait de mieux en mieux son nouvel environnement, parle mieux la langue locale, ce qui facilite la prise de contact ( qui n'a pas été favorable d'ailleurs, on s'est moqué de lui et on lui a même dit de retourner dans son pays). Je fais du pouce sur ce point précis pour les lecteurs ados qui liront le livre, mais au regard de ce que vis le personnage, n'est-ce pas un raison de plus d'être accueillant et bienveillant envers nos nouveaux arrivants? Ils et elles ont déjà beaucoup de choses à gérer de nouveau et c'est déstabilisant ( dépendamment aussi du niveau d'écart culturel , socio-économique et politique entre les deux pays, on s'entend). Bref, s'il y a du travail qui se fait du côté de l'immigrant, il faut qu'il y en ait du côté de l'hôte. J'aime bien les Unik pour les sujets qu'ils apportent avec une manière somme toute facile, mais immersive. Comme ce fut le cas pour les autres que j'ai pu lire et apprécier, j'ai le sentiment qu'il est une belle "lentille" dans laquelle regarder et observer un tout autre point de vue. Beaucoup de fictions le permette, je le conçois, mais il y a dans ces petits livres un gros "focus" sur un enjeu en particulier qu'on ne peut tout simplement pas occulter. Ici, il est question de déracinement, avec les thèmes qu'ils sous-tend, et ça nous monopolise entièrement. Comme la plupart des Unik, il se termine sur un espoir, un axe favorable , ici la prise de racines de notre narrateur. Et même une petite prise de conscience: Quand on vit un déracinement, même si je me doute que cela n'est pas une expérience qui réussira à tout le monde, reste que l'auteur a un point intéressant au sujet de son "soi en tant que maison". Mais je pense aussi que tous les gens ne sont pas en mesure d'attendre cette vision de soi, pas par incapacité ou faiblesse, mais par tempérament. Si certains deviennent des "voyageurs", d'autres sont très attachés à leur maison ou leur pays. On est tous des "plantes" uniques. Ça me fait penser qu'il y a donc matière ici à un échange sur le sujet. J'ai envie de dire qu'on en prendrait plus, il y matière à en faire un petit roman, mais je respecte le choix de ce format plus petit et concis, qui devient une sorte de "mise en bouche" sur le sujet. Une autre belle "lentille" poétique et pertinente pour la collection. Pour un lectorat adolescent, 1er cycle secondaire, 12-15 ans+ ( Mais je pense que les 11-12 ans aussi peuvent s'y intéresser).
Shaynning a apprécié, commenté et noté ce livre

La cabane

Par Ludovic Lecomte
(4,0)
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Incontournable Roman ado Mars 2024 Avec ses chapitres en compte à rebours, ses textes épurés parfois à la frontière des vers libres et dont même la ponctuation disparait parfois dans les moments d'angoisse, comme si la respiration du texte aussi devenait difficile à gérer, "La Cabane" s'intéresse à un syndrome qui n'est pas nouveau, mais qui a eu un regain de manifestation durant la pandémie. Forme d'angoisse sociale, de repli sur soi et d'état d'anxiété aux manifestations somatiques similaires aux crises d'angoisses, le "syndrome de la cabane" me rappelle même le phénomène rependu au Japon des hikikomoris. Ces personnes vivent en retrait quasi total de la société, dont seuls les écrans deviennent des moyens de communication avec le reste du monde. Si les hikikomoris semblent être davantage liés à un statut social dans sa perception sociale, le présent roman s'intéresse plutôt à ses dimensions psychosociale et mentale. Le narrateur est un ado, qui a du jour au lendemain été dans l'incapacité physique et mentale de franchir le seuil de sa maison. Un état inédit, étrange, qui semble flotter quelque part entre l'angoisse et l'insécurité, qui peut paraitre à la fois réel et irréel pour les gens autours, mais qui est tout-à-fait réel pour celui qui le vit. On ne sait pas d'emblée de quoi souffre cet ado, qui semble en proie à des émotions et des pensées pour le moins intrusives. La culpabilité et l'incompréhension de son état rajoute une couche d'angoisse. Dans un texte simple et particulièrement efficace, l'autrice parvient à illustrer un état mental qui ressemble à une prison dans un crâne, dont il faut maintenant en saisir la nature. Grâce à une intervenante psychologue et l'appui d'une personne ayant vécu un état similaire, Manon, le jeune homme parvient progressivement à cheminer pour guérir, car il s'agit bel et bien de guérison mentale. Avec ses échecs, ses va-et-vient, ses peurs, ses objectifs et sa lente compréhension d'un état encore mal connu, il nous amène vers l'objectif central du roman: Sortir de la maison. J'adore quand les auteurs et les autrices font dans la psychologie et s'en sortent bien, car ce n'est pas un sujet toujours facile ou intuitif. C'est néanmoins fondamental d'en parler, car la santé mentale importe autant que la santé physique. Or, c'est relativement nouveau dans l'histoire de l'humanité que de traiter la santé mentale, sans tomber dans tous les navrants stéréotypes et fausses informations qui l'ont jalonnée. Le roman est un huis clos mental, en quelque sorte, où la guérison se fait avec de la déconstruction de schèmes de pensées, des techniques de gestion des émotions et du comportement, une réappropriation du pouvoir d'agir et tout ça sans avoir la source même de l'état anxieux. Ça va finir par être découvert et ce n'est pas étranger aux changements climatiques. En effet, le narrateur se découvre une éco-anxiété et mettra du temps pour le découvrir. Il faut parfois beaucoup d'introspection et d'auto-anlayse pour trouver des réponses en soi sur notre état mental, ce n'est pas pour rien que des expert.e.s existent pour accompagner les gens. Aussi, j'ai beaucoup aimé voir les différents cercles sociaux: la sphère des amis, celle des parents, de la famille élargie, de l'intervenante et Manon, dont le rôle est quelque part entre le support, la camaraderie et l'épaule de réconfort. La présence de ces sphère asociales saines est assurément un facteur aidant pour le narrateur, même si la maman avait beaucoup d'attentes, même si le papa était maladroit. En fait , c'est très crédible, car tout bien intentionnés soient-ils, ils restent humains. Mais ça ne change rien à leur degré d'implication et restent qu'ils n'ont pas chercher à le tirer de force de son état. Et c'est ce qui fait la différence. J'ai envie de dire que c'est une belle incursion dans le monde de la psycho-intervention, même courte et même concise. On a rarement l'occasion d'en lire et encore moins de la voir chez un garçon. Parmi les innombrables enjeux sociaux, adresser et traiter les enjeux de santé mentale au masculin est réel, car les chiffres le démontrent: les hommes vont moins chercher de l'aide, que ce soit par peur du jugement, par leur éducation ou encore parce que les services sont inadaptés. Il faudra donc normaliser la santé mentale chez nos ados garçons dans la fiction aussi, si on veut déconstruire le mythe de l'homme invulnérable psychologiquement. Avec sa formule courte et son traitement atypique dans sa structure, le roman est accessible autant aux lecteurs habitués qu'aux lecteurs occasionnels ou avec des défis en lecture. Une occasion de se poser des questions su un enjeu sociale réel, celui de le santé mentale chez les jeunes, de découvrir un univers invisible complexe et fascinant qu'est la psyché humaine et une ode à l'espoir, puisque nous avons maintenant les moyens d'aider les gens souffrant psychologiquement et mentalement de guérir ou à tout le moins, de tenter de le faire. Après tout, l'une des remarquables qualités dont jouissent les humains est la résilience. Et j'ajouterais qu'il n'y a pas de petites victoires, surtout dans l'aboutissement d'un long et exigeant processus de guérison, peut importe la forme. Pour un lectorat adolescent du premier cycle secondaire , 12-15 ans+.
Shaynning a apprécié, commenté et noté ce livre

Les squelettes du lac des tombeaux

Par L. P. Sicard
(4,0)
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Incontournable Roman Mars 2024 Je pense qu'on peux affirmer sans trop se tromper que les auteurs ayant donné vie à la sinistre série des "Contes Interdits", romans d'horreur qui réécrivent les contes en version modernes scabreuses et horrifiantes, se tournent maintenant vers la jeunesse. Une excellente idée, me semble-t-il , car l'intérêt pour le genre Épouvante est assurément présent, foi de libraire jeunesse. Mieux encore, il semblerait qu'on s'intéresse aux contes et légendes d'ici. Alors emmitouflez-vous dans votre meilleure couverture chaude et attachez vos tuques, car pour ce roman-ci, le plus effrayant des quatre premiers parus de cette collection sombre, nous nous aventurerons en Mauricie, dans une forêt sublime de jour, mais porteuse d'une sombre vérité historique la nuit, au risque d'y perdre l'esprit. Max hérite d'un chalet quand son père décède d'une maladie. Situé en Haute-Mauricie, au Nord-Ouest de la Tuque, l'endroit est éloigné et en pleine forêt. N'ayant pas envie de découvrir l'endroit seul, Max emmènes Estelle et Franck, ses cousins plus jeunes, et ce d'autant plus que Richard tenait un discours étrange sur ces lieux, parlant de squelettes en nombre appréciable, de lac hanté et d'artéfacts autochtones. Sur place, ce que les jeunes adultes découvrent est effectivement déconcertant, pour ne pas dire macabre, et Max, avide de réponses, ne semble pas réaliser le péril dans lequel il les place tous les trois. Comme je le mentionnais dans l'intro, il y a une première fournée de romans dans la collection, avec "Le trou du Diable", "les Sorcières de Beauce", "Les sirènes du golfe" et le présent ouvrage, "Les squelettes du lac des tombeaux". Ce sont tous des petits romans d'environ une centaine de pages dont le design de couverture sombre et leur cadre stylée commun rappelle celui de leur grande sœur "Les Contes Interdits", pour le lectorat adulte. Ils s'inspirent des légendes et histoires de la province du Québec, territoire d'une jeune nation qui s'est bâtie sur celle de nombreuses autres, les premières nations, et qui du fait de son histoire coloniale et de la mainmise terrible de l'Église, n'est pas en reste d'histoires terrifiantes. Il existe sur la 4e de couverture un gradient d'horreur, comme pour la collection Courte Échelle Noire, avec 4 niveaux. On les retrouvent au haut de la 4e de couverture, sous forme de petites têtes de mort sur deux os croisés. Le présent ouvrage est au niveau 3, "Élevé" et en bas de la 4e, vous trouverez les gradient d'horreur des autres livres. La série indique clairement le groupe d'âge tout en bas: "Les Légendes terrifiantes d'ici est un collectif de livres d'horreur destinés à un public de 13 ans et plus", alors il n'est pas possible de prétendre qu'il sont destinés aux plus jeunes. J'apprécie toujours ce genre de transparence, car ainsi, le ou la lectrice peuvent faire un choix de lecture libre et éclairé. À partir d'ici, il y aura des divulgâches. J'ai repéré une ou deux "erreurs", cependant. Déjà, la 4e de couverture présente une variation du titre: "les squelettes du Lac DU tombeau" à la place du "DES". Ensuite, à la page 61, on a Estelle qui "hurle, échappe le candélabre, dont toutes les flammes s'éteignent", mais en page 69, "Les trois bougies sont à moitié consumées". Faudrait savoir, elle a ou non le candélabre et est-t-il éteint ou non? Enfin, je ne peux pas m'empêcher de me demander comment le père de Max, Richard, a pu vivre si près du lac, connaitre ses chemins, piquer quelques squelettes au passage, avoir une cabane tout près de ses berges et malgré tout ça, mourir de maladie des années plus tard, alors que les trois jeunes sont condamnés le jour 1? Surtout que le père a vu les rituels, ce qui signifie, on le voit avec les trois jeunes, qu'il était très près des berges. Donc, pourquoi a-t-il été épargné à moult reprises? Est-ce parce qu'il est resté dans son chalet sans chercher à fuir? Mais alors, comment pouvait-il vivre? D'où venait ses ressources vitales? Bref, l'histoire entourant le père ne fait pas sens à mes yeux avec le déroulement et la "logique" de ce que vivent les trois jeunes personnages. N''empêche que globalement, c'est intriguant cette histoire, qui me rappelle la tournure du roman de Stephen King , chambre 1408, dont on ne pouvait plus sortir car on devenait prisonnier d'une réalité différente, d'une entité malveillante qui s'attaque à l'esprit, en quelque sorte. L'auteur est resté assez fidèle aux éléments retrouvés dans la légende d'origine, avec l'homme brûlé dans une cabane, le chien devenu fou qui attaquait les arbres et courait après sa queue et la légende à vérifier ( Sources: Créatures fantastiques du Québec. 2, Bryan Perro). D'ailleurs, je mentionne que Brian Perro, celui qui semble à l'origine de cette collection, a écrit deux livres sur les créatures fantastiques du Québec, et donc, se retrouve en tant que source d'info pour la collection. Il est toutefois possible de trouver divers informations sur Internet, mais elles sont souvent extraites de sources bibliographiques. Le récit coule bien, on se laisse facilement entrainé dans cet univers en huis clos, ramené sans arrêt vers les berges du lac truffé d'ossements et de ses habitants sans repos. J'aurais peut-être aimé que l'information sur la mort massive des autochtones, soit la raison de tous ces squelettes en ce lieu, soit moins "garochée" ( jetée rapidement). Les épidémies engendrées par l'arrivée des européens est un réel phénomène historique et qui a causé de grandes souffrances chez nos premières nations, en plus d'être la source de la malédiction entourant le lac aux tombeaux et sa légende, donc j'estime que ça aurait pu être un peu plus central comme information. Néanmoins, il est clair que les défunts sont des autochtones, au moins il n'y a pas d’ambiguïté là-dessus. Il y a un aspect qui m'intrigue toujours beaucoup dans les romans d'épouvante jeunesse spécifiquement: Jusqu'où l'auteur ou l'autrice va-t-il/elle nous entrainer? On ne peut pas traiter un roman jeunesse comme un roman adulte en raison de l'âge des lecteurs, lié à leur développement psycho-neurologique. Je me demande donc systématiquement où la frontière de l'horreur est tracée dans ces romans. Les romans du niveau intermédiaire, par exemple, font très rarement mourir les personnages et certaines violences, comme la sexuelle, sont absentes de ce groupe d'âge. Ici, nous sommes dans la littérature adolescente, il y a donc des frontières qu'on peut traverser et l'auteur ne se prive pas. Les jeunes personnages ne s'en sortiront pas et leur mort, dont on ne livre pas les détails dans le cas de Max, se solde par une noyade volontaire pour les deux autres, ensorcelés par la magie noire des lieux. Et certaines scènes sont effrayantes, je pense notamment à cette scène plus ou moins "réelle" ( mais réelle pour les deux jeunes qui l'ont vue) où Max se promène tranquillement en étant pourtant immolé. Il était déjà mort, en témoigne les os que sont ses jambes, mais quand même, sur le coup, ça saisi. Je pense que ça fera bien frissonner les amateurs et amatrices de romans d'horreur du lectorat adolescent, mais je ne le suggère pas aux non-initiés au genre. Peut-être faudrait-il mieux commencer par les romans au niveau 1 avant de s'attaquer au niveau 3? J'ajoute que sa petite taille de moins de 100 pages permet aussi d'aller chercher le lectorat moins habile ou patient en lecture, ou tout simplement les lecteurs qui veulent des histoires expéditives. En même temps, le roman tient à la fois de la légende et du fait divers, c'est donc cohérent qu'il soit court. Bref! Un bon petit livre efficace et qui met en lumière une vieille légende de la province québécoise, teintée de réalité historique, suffisamment sombre et perturbant pour convenir aux initiés du genre, à mon humble avis. Pour un lectorat adolescent du premier cycle secondaire, 12-15 ans+
Shaynning a commenté et noté ce livre

Terre promise

Par Philippe Arnaud
(1,5)
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Roman abandonné [ Quelque part au milieu entre deux cactus] " Une femme shérif et un n**** au comptoir?!" Peut-t-on voir bien en évidence sur la quatrième de couverture, avec avouons-le, une jolie couverture. Malheureusement, cette promesse ne présente ni la femme libre espérée ni l'afro-caméricain libéré escompté, pour tendre vers ce qui est à mon sens rien de plus qu'un énième "Far West" fantasmé - pas historique - tels que vus dans le cinéma américain des années 50-60, avec la palette de clichés et de stéréotypes qu'on leur connait. Un roman violent, peu crédible et véhiculant d'agaçants stéréotypes. À mon avis, bien sur. On retrouvera une femme shérif , une superbe plante blonde à belle poitrine, qui a flairé le salaud de passage dans la personne du personnage principal, une parodie de "cowboy" aussi sexiste que raciste, avant de le baiser, quelques heures à peine après être arrivé dans la petite ville. Comment peut-on prendre au sérieux un personnage féminin aussi stupide. Je n'ai jamais comprit les hommes qui croient que les femmes sont prêtes à coucher avec un homme dont elle ont mauvaise opinion "juste parce qu'il est sexy et mystérieux". C'est affligeant. On a un "n****" ( Concédons ici des circonstances historiques avérées) qui est barman, Louis, un personnage extraordinairement secondaire pour un héro qui arrive d'entrée de jeu. Rien à voir avec les œuvres à la Underground Railroad ici, on est dans le cliché type du personnage Noir costaud qui a perdu sa femme sur une plantation de coton et l'asservissement dont a été victime, effacé et affable. Loin de moi l'idée de banaliser son état, mais je vous rappelle que des Noirs existaient à pareille époque dans le Nord anti-esclavagiste et le Canada - le gros pays au Nord des States dont aucun Western ne parle jamais en dépit d'une Histoire pourtant très intéressante et en parallèle de la Ruée vers l'Or américaine. J'aimerais bien un Far West Canadien une bonne fois. Bref. On est pas dans un type de personnage intéressant et pertinent, c'est bien triste, surtout qu'on nous le présente sur la 4e de couverture comme un commerçant. Sinon, le hér..non, pas ce mot, franchement ce serait surfait. Beau, jeune, mâle alpha blanc typique, sexuellement attractif, rustre et évidemment pas commode, c'est tellement cliché que s'en est banal. On dirait un personnage de Harlequin War Fest ou l'un des innombrables mâles alpha de romans érotiques actuels. Je n'arrive pas à comprendre ce personnage principal, surtout que ses figures paternelles avaient du sens, surtout pour l'époque. Oui, le second est un propriétaire d'esclave, mais il n'était pas si férocement sexiste et insensible. Je ne comprend pas la psychologie du personnage, Jim Whitefoot de son prénom. Jim "piedblanc", sérieusement? Il est encore moins intéressant que notre barman, qui lui au moins n'est pas un foutu couillon. Parlant de noms, je suis très perplexe devant l'absence de travail autours des autochtones ( qu'on appelaient "Indiens" tout comme on appelait "N****s" les Noirs). Ils sont caricaturaux, ont des noms digne de camp de vacances comme "Renard Agile" ou Aigle Sage"...Mais ça va faire cette manie de mettre un animal et un adjectif et de prétendre que c'est un nom autochtone?! Et ce serait trop demander de le mettre dans la bonne langue? De la bonne Nation? Il existe des dictionnaires numérique sur les premières nations, maintenant, alors pas d'excuses. Et cette histoire de scalp, j'en perd mon latin - enfin, mon français- c'était prévisible: Encore une fois, on semble croire que c'était courant chez les autochtones, mais sans contexte religieux et conflictuel précis, ça n'avait pas de signification. Aussi, c'était certaines nations guerrières ( donc pas la majorité) qui la pratiquaient. La violence est crue et elle est souvent inutile. le "Gros Méchant" de service est bien sur une brute cruelle balafrée amateur de scalps, sans cœur, sanguinaire, un brin timbré, qui commets des horreurs parce qu'il les a apprise. Bah oui, comme dans les films de western en somme. Manquait juste les crachas. Comme ce personnage odieux est dépourvu d'âme - mais dans le sens d'être crédible, pas dans le sens "humain", ça on avait comprit. Je suis contre les antagonistes totalement noir d'âme, parce que c'est manichéen et parce que ça manque totalement de nuances. Or, l'Histoire, elle est nuancée. L'Humain aussi. On a donc un supraMéchant qui tue, viole, casse, détruit, scalp, emmerde tout le monde et bien sur, tous les autres vont faire front commun contre lui. ( Musique de flûte style "avant le duel). Je pense que cette œuvre n'est pas originale, ni Historique, ni pertinente. On ne dénonce pas les comportements odieux des acteurs sociaux de cette époque et pourtant les sujets ne manquent pas. On n'offre pas de personnages nouveaux et psychologiquement crédibles. Il est fort probable que ce roman plaira à ceux qui ne connaissent pas du tout l'Histoire Nord américaine et les films Western tous plus sexistes, machistes et racistes les uns que les autres, en bonne glorification du colon Blanc chrétien américain moyen, et qui y verront un roman d'action. Dernier truc qui m'a irrité: quand le Canadien français ( parce que ça ne s'appelait pas encore un "Québecois") est inclut, soit c'est l'imbécile de service, soit, comme ici, c'est un sale petit pervers. ( Soupir) Pourquoi le si petite nombre de représentants de la Belle Province dans les œuvres françaises ont systématiquement un rôle ingrat? Commentez cette affirmation, s'il vous en prend l'envie. Ce roman me semble un bon exemple de ce qu'est un Western dans l'imagination des européens, mais si certains éléments sont emprunts d'une certaine vérité ( surtout les réalités sociales) , reste que le reste est emprunté au décor du cinéma. Si cela vous intéresse, il y a une série western beaucoup plus intéressante quand il s'agit de malmener les stéréotypes tout en dressant un portrait de cette époque à cet endroit du monde: "Terre sans Dieu", "Godless" en VO, sur Netflix. Pour un roman une femme réellement moderne pour son époque, il y a "Maddie Maud", de Camille Bouchard, aux éditions Québec Amérique. Compte tenu de l'intensité de la violence et du langage parfois injurieux ( ou à caractère discriminatoire) nous avons placé ce roman en Jeune Adulte, 17 ans et +.
Shaynning a commenté et noté ce livre

Bleu et absolument génial

Par Nadine Brun-Cosme et Sarah Vehla
(3,0)
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La maison Voce Verso propose un 3e livre pour sa collection "Hissez ho!", ces hybrides entre le roman et l'album. Ce troisième membre aborde l'absence d'un parent et les moyens parfois étonnants des enfants pour y faire face. Appolline est une petite demoiselle de 8 ans, qui voit sa mère partir pour une semaine et demi, pour son travail. Le papa choisit ce moment pour se débarrasser des chaussettes bleues favorites d'Appolline, celles que lui avait données sa maman. Quand elle trouve un fin brin de laine bleu entre ses deux orteils, Appolline se met alors en tête de garder là, comme un petit secret. Durant les prochains jours, c'est également le quotidien ponctués de petits moments pétillants ou un peu plus maussades entre la petite fille et son papa. Quand j'étais monitrice de camp de jour, il m'arrivait quelques fois de me faire dire des choses pour le moins insolites, des constatations ou des idées qui émergeaient de l'imaginaire des jeunes dont j'avais la responsabilité. Moi qui ait souvent le réflexe de chercher la logique derrière tout, je me suis retrouvée plusieurs fois devant rien de logique du tout, mais au fond, j'en ai apprit que dans le monde des enfants, la logique, c'est très relatif. Ça répond à leur vision et comble un besoin qui échappe peut-être à ma compréhension, mais qui doit avoir un sens pour eux. Pourquoi évoquer tout ça? Parce qu'à priori, on peut rester perplexe devant cette jeune fille aux idées farfelues. Mais au fond, peut-être que c'est là la manifestation de son sentiment de manque face au départ e sa mère, une sorte de petit rituel ou une mission secrète, un point de repère peut-être? Après tout, elle les aimait ses chaussettes. Peut-être que c'était des objets un peu fétiches même? ET que ça lui a causé un petit choc de s'en être fait dépossédé aussi vite, à un moment où elle en avait besoin. Les humains me semblent souvent créatif quand vient le temps de gérer leurs émotions ou survivre à des changements, et les enfants, avec leur imagination fertile, ont sans doute des façons encore moins orthodoxes de le faire. Comme tenir à un petit bout de textile entre deux orteils ou l'échanger contre un bonbon quand il se perd dans les tuyaux du bain. Même Appolline semble avoir une opinion en demi-teinte d'elle-même, en disant de plusieurs façon qu'elle a de drôles d'idées et que cela la distingue des autres. Mais quand on y regarde de plus prés, au fond, qu'est-ce que ça change? Si ça lui procure un sentiment de sécurité et détourne son attention de la source de son manque, grand bien lui fasse. Ce qui m'a surtout touché dans le récit est le papa, un peu maladroit, mais bien intentionné malgré de petites rigidités. Je pense que c'est là l'enjeu dans le départ de l'autre parent, c'est pour le parent qui reste de trouver sa routine et ses repères avec l'enfant. Pas de se substituer à l'autre parent, mais de garder son rôle et s'approprier le quotidien. Le petit moment partagé devant le frigo était mignon justement pour ça. Ce n'était pas une habitude de la maman, mais bien un moment spontané avec le papa, un élément atypique et partagé entre fille et père. Donc, il y a de la pertinence et j'aime bien les romans illustrés, mais ce qui m'asticote quelque peu est la question du lectorat. Je ne vois pas trop à quel genre de lecteurs je le confierais. Ce n'est pas le récit le plus intuitif à comprendre et pas le sujet le plus passionnant non plus. Peut-être que ce sera pour un lectorat plus ciblé, comme pour les enfants qui affrontent directement le même enjeu. Et comme j'ai du extrapoler pour cerner les enjeux, qui ne sont pas aisément détectables, je me demande si les jeunes vont comprendre où veut les amener l'autrice? Petit détail qui est aussi mignon: La couleur bleue. Je vois encore trop souvent des personnages féminins coincées avec la couleur rose, alors chaque livre qui fait le contraire fait du bien. En somme, c'est un livre qui m'aura fait cogité un peu, car je n'ai pas tout saisi d'entrée de jeu, qui présente un sujet intéressant, mais dont il va falloir chercher son lectorat, parce que je pense qu'il ne se fera pas adopter facilement. Et la 4e de couverture n'aide pas à savoir quel est le sujet du roman. Pour un lectorat intermédiaire, à partir du 2e cycle primaire, 8-9 ans+
Shaynning a apprécié, commenté et noté ce livre

Dans la nuit, tu te dévoiles

Par Isabelle Jameson et Sylvain Cabot
(4,0)
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Incontournable Album Mars 2024 Il y a un moment déjà que j'attendais un album sur le sujet de la transidentité pour mes lecteurs plus vieux du 2 et 3e cycle primaire, le lectorat intermédiaire. Et c'est une autrice de ma province qui en est l'autrice. Alex est bercé depuis l'enfance par les étoiles, qu'elles se retrouvent dans la comptine que lui chantait sa mère, au plafond de sa chambre et dans les histoires qu'on lui a lues. Quand la puberté a commencé, Alex est passé d'enfant rieur et joyeux à taciturne et mal à l'aise. Il cherche à cacher ses seins qui commencent à pousser derrière de larges kangourous, refuse désormais de porter des robes et se sent mélancolique. Quand il cède sa place à une apinée dans l'autobus de la ville et que celle-ci le remercie en utilisant les mots "grand fille" et "bien gentille", Alex le prend assez mal. Non pas que les mots soient mesquins, mais peu à peu, Alex comprend qu'il n'est pas une fille, mais bien un garçon. Reste maintenant à trouver la façon de le dire à sa famille et espérer que son monde ne va pas éclater. Alex est un enfant transgenre, assigné "fille" à la naissance, mais "garçon" dans son identité. Les changements dans son corps semblent marquer la divergence entre son physique et sa psyché. Il est cependant inquiet de la réaction des autres. Néanmoins, Alex va trouver de la part de sa famille le support et la compréhension dont il a besoin. Loin de le rejeter, la famille accueil son annonce à bras ouverts. Même son de cloche de la part de ses camarades, qui auront certes besoin de temps pour employer les bons pronoms. En somme, l'explosion de son monde qu'il redoutait n'est pas venue. Et c'est ce qu'on souhaite à tous les jeunes qui ont passeront par une transition de genre. Un monde bienveillant et sans jugements. J'aime bien le style graphique, qui s'adapte bien aux lectorats plus vieux. On y retrouve une belle diversité ethnique et corporelle, la palette de couleur est à la fois douce et sobre, avec une dominance des bleus, des oranges et des mauves, qui servent souvent le registre émotionnel du personnage. J'apprécie aussi qu'on ait choisi de mettre autant des comportements que des émotions dans le cheminement d'Alex, car il y a bien sur des deux dans un processus de transition. Ce n'est pas qu'une simple affaire de changer de garde-robe ou de coupe de cheveux, il y a tout un processus interne qui relève de l'identité, de la perception de soi et l'estime de soi. Il importe selon moi de bien cerner cette dimension, qu'on ne voit pas forcément, mais qui existe et dotn il faut savoir prendre acte. C'est une question de respect de l'autre, mais également d'empathie. Bref, un bel album pour "un" bel étoile, qui a trouvé sa façon de briller et qui pourra grandir en accord avec sa vision de soi, dans le corps et l’esprit qui sont les siens. Un album bienveillant et rempli d'espoir, à partager dans les écoles autant que les foyers. Pour un lectorat intermédiaire à partir du 2e cycle primaire, 8-9 ans+
Shaynning a apprécié, commenté et noté ce livre

Loujain rêve des tournesols

Par Lina Alhathloul, Uma Mishra-Newbery et Rebecca Green
(4,0)
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Incontournable Album Mars 2024 Le présent album est inspiré d'une femme qui porte le nom de Loujain, une saoudienne arrêtée pour le simple fait d'avoir conduit un véhicule. Les libertés et les droits des femmes continuent d'être bafoués dans certaines régions du monde et des gens continuent de lutter pour une plus grande équité entre les genres. Loujain est une petite fille qui vit dans un monde où il est possible de voler. Néanmoins, Loujain réalise qu'en tant que fille, elle ne pourra jamais voler car c'est interdit aux filles, et ce, en dépit du fait qu'elles peuvent avoir des ailes elles aussi. La jeune fille voudrait tant aller sur les champs de tournesols comme son père le fait régulièrement. Un soir, alors que Loujain est triste que son propre ami, Ali, lui ait rappeler l'interdit qui pèse sur elle, la maman et papa de Loujain ont une conversation. "Si tout le monde a des ailes, pourquoi est-ce seulement les garçons qui peuvent s'en servir? Si tu ne l'encourage pas [ Loujain] qui le fera? Tu dois croire que les choses vont changer. Sinon, elles ne changeront jamais." À partir de ce moment, le papa décide d'honorer la demande se sa fille et lui donne ses premières leçons de vols, en vue d'un jour, gagner les champs de tournesols avec sa fille. Et même si elle fait la une des journaux et s'attire des regards désapprobateurs, Loujain devient un modèle et une inspiration pour les autres petites filles. Être la première a faire quelque chose, être une pionnière, surtout contre un interdit, doit demander un courage à toute épreuve. Cela dit, quand il est en plus porté par le soutient des pairs, proches ou amis, il devient encore plus solide. L'histoire de Loujain est celle de nombreuses filles et femmes réelles, qui voyaient des injustice dans le simple fait d'être nées femmes dans un monde d'hommes conçu pour des hommes. Cette iniquité est d'autant plus insensée qu'elle est profondément disparate entre les pays dans le monde. Tandis que des femmes sont de plus en possessions de leurs droits, d'autres pays connaissent des reculs. Ici, il est question de "voler", ce qui peut incarner pleins de formes de libertés et on constate qu'aucune raison ne vient véritablement expliquer le "pourquoi" les filles n'ont pas le droit de voler. En revanche, j'observe qu'un papa se pose la question et demande même un avis à sa conjointe. J'aime bien qu'on illustre que tous les hommes ne sont pas d'accord avec le clivage de genre, ne serait-ce que par logique ou par justice. Et je veux bien croire qu'il y a des papas qui veulent ce qu'il y a de mieux pour leur fille, leur enfant. C'est donc un bel album sur un thème qui revient souvent, mais qui restera toujours pertinent, car les droits et les libertés des femmes ne seront jamais garantis. Comme le disais Simone de Beauvoir : "Rien n'est jamais définitivement acquis. Il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Votre vie durant, vous devrez rester vigilantes". Du reste, je suis toujours heureuse de trouver des albums qui met en vedette des enfants des pays moins représentés, comme ceux et celles du Moyen-Orient. Vous trouverez de plus amples informations sur Loujain Alhathloul, dont sa photo et son combat, à la fin de l'album, ainsi qu'un mot des autrices. Pour un lectorat préscolaire, 4-5 ans +
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D'aile en aile

Par Angèle Delaunois et Catherine Plante
(4,0)
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Incontournable Documentaire Jeunesse Mars 2024 Mélange de poésie, de documentaire sur les oiseaux et sous la forme d'un abécédaire, le présent ouvrage se veut polyvalent et pertinent. Avec de jolies illustrations et un mélange intéressant entre la délicatesse de la poésie et la pertinence du documentaire, "D'aile en aile" rafraichit la façon de consulter un ouvrage spécialisé. Je précise que les animaux des lettres W, X, Y et Z proposent des animaux autres qu'oiseaux puisque qu'il n'y a pas d'oiseaux dont le nom débutent par ces lettres dans le répertoire des oiseaux du Québec. J'ai vérifié, vous pouvez d'ailleurs consulter ce répertoire sur ce site: https://animauxduquebec.ca/oiseauxduquebec/passereaux/ Je mentionne également la mention spéciale au Harfang des neiges, ce grand hibou blanc popularisé par la saga Harry Potter, qui est l'emblème animalier national québécois, qui est présenté à la fin. Un bel hommage à nos oiseaux de la Belle Province. Pour un lectorat intermédiaire à partir du 2e cycle primaire, 8-9 ans pour la lecture seule, mais les 6-7 ans du premier cycle qui auront envie de s'y intéresser pourront le faire avec l'accompagnement d'un.e Lecteur/Lectrice expérimenté.
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Une patte en moins !

Par Irene Frigo
(4,0)
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Incontournable Album Mars 2024 Voici un sympathique petit Sans texte rigolo qui a une structure répétitive. Une chaise jaune, placée quelque part à l'extérieur, n'a que trois pattes. On cherche à lui trouver une potentielle 4e patte, mais aucune ne dure dans le temps. La première est une baguette de pain, qui a tôt fait d'être mangée. S'en suivent toute sorte d'objets et d'animaux ( oui, il y a un chat qui se prend momentanément pour une patte de chaise). Ultimement, c'est une petite plante qui va gentiment croître juste à la bonne place et non seulement devenir une patte fort solide, mais qui va englober la chaise au complet. Comme quoi , dans le doute, demandez à Dame Nature! Après tout, si on a envie de dévorer la baguette ou la pile de livres, que les animaux ne tiennent pas en place et que les objets nous donnent envie de les employer, la Nature est la reine de l'adaptation et notre gage d'avenir. Petite anecdote: En cherchant l'origine du livre, j'ai trouvé sa première édition...en turc! Et dans sa langue natale, l'album s'appelle "La chaise qui cherche ses pattes" ( Bacağını Arayan Sandalye) . C'est tellement plus mignon! De quoi surprendre et amuser les jeunes lecteurs et servir les profs dans leur ateliers d'écriture. Pour un lectorat de la petite enfance, 3-4 ans et plus!
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Le tribunal des animaux

Par Camille Bouchard
(4,0)
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Incontournable Roman ado Mars 2024 Habitué des romans historiques pour les ados, cette fois, Camille Bouchard nous amène dans un univers bien réel, bien actuel, le nôtre. Vous ne sortirez pas indemnes de ce roman. J'apporterai une nuances que l'auteur ( oui, Camille est un monsieur et ça se prononce "Ca-mil") a fait d’emblée dans le roman et qui a sa part d'importance. Je le cite: "Aucun animal n'a été maltraité pour les besoins de ce roman. Par contre, chaque seconde, pendant que vous lisez ces lignes, une trentaine d'animaux d'élevage sont abattus au Canada. Chaque seconde! Et la plupart d'entre eux meurent dans des conditions résolument inhumaines. On ne demande à personne de devenir végétarien, on tient seulement à ce que les animaux soient traités de manière plus sensibles. ( Vous avez fini de lire cette page? Sept cents bêtes sont déjà mortes...et plusieurs de façon atroce.)" La nuance est donc là: La question n'est pas de manger de la viande ou pas, la question soulevée est celle de la cruauté fait envers les animaux et en particulier les animaux destinés à garnir nos assiettes. Sous prétexte d'économies et de rentabilité, nous avons industrialiser des machines de mort toujours plus efficaces et toujours plus cruelles. Donc, si vous lisez toujours, qu'avons-nous? Marquise est la poule alpha du poulailler de Gens du Bio et dans leur petit monde d'animaux de ferme, et elle mène une enquête. Drôle d'idée pour une poule, trouverez-vous et puis, enquêter sur quoi? Tout a commencé avec l'arrivé d'un coquelet obèse sur leur ferme, décharné et passablement traumatisé, qui a survécu ni plus ni moins à une chaine de production de poulet et s'en est échappé. Le récit glaçant de "Porcelaine", qui n'avait pas de nom jusqu'à ce jour, fascine et terrorise tout à la fois la petite communauté, qui n'avaient jamais entendu parler de pareils traitements. Décidée à comprendre ce qui se passe pour les autres animaux, Marquise décide de constituer le tout premier tribunal pénal des espèces, et qui dit "procès" dit aussi "preuves". La poule est loin d'imaginer ce qu'elle s'apprête à apprendre. Et nous, lecteurs, non plus. Le récit a deux axes, le premier étant celui de l'enquête de Marquise et de ce qui se passe dans leur ferme, tandis que le second est le parcours dramatique de Porcelaine. Ce qu'on y apprend a de quoi bouleverser, c'est dur à lire et c'est dur à admettre. On a ni plus ni moins traité les animaux comme des êtres sans conscience, sans émotions et sans perceptions. Or, les études le prouvent, on en ailleurs: Les animaux ont des facultés mémorielles, ont des comportements pro-sociaux, la majorité ont de bonnes facultés cognitives et ils ont très certainement une psyché, et donc des émotions. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais vous aurez des passages sur les conditions de vie de certaines "usines" ( ce ne sont pas des fermes à ce stade), sur le peu de considération pour la santé des bêtes, encore moins pour les souffrances qu'on leur cause. Certaines amputations subies par les animaux sont même effectués à titre préventif, alors que certaines sont pour changer le gout de la viande. Certaines sont pratiqués sur des bébés animaux, à froid. Tout est pensé pour le rendement, le nombre et la facilité. Au contraire, les fermes bio semblent repensent les modes de productions et les pratiques, avec même un certain retours aux sources, moins "industrielles" et une proximité plus chaleureuse avec leurs animaux, qui ne sont pas que de vulgaires "produits". Je pense que le fond est là: Pouvons-nous changer notre façon de faire et de penser la consommation de viande? Comme il est d'ailleurs mentionné dans le roman" manger de la viande" reste un fait animal, que beaucoup d'animaux ont besoin. Cependant, avons-nous besoin d'en ingérer autant, nous qui sommes omnivores? Est-ce envisageable de repenser nos pratiques? Repenser notre façon de consommer et surtout, de choisir nos produits pour opérer un changement de mentalité au sein des producteurs? Cela nous amènerait peut-être à davantage encourager nos producteurs locaux, nos petites entreprises, qui adhèrent à des valeurs plus axées sur le bien-être des animaux? Est-ce que...Sait-on déjà arrêter à nous demander si tout ça était moral? Adéquat? Humain? En même temps, l'humain a de lourds antécédents en matière de machine de morts et de pratiques cruelles, pensons aux camps de concentrations nazis autrefois et ouïgour actuels, ou encore à l'esclavagisme des africains, véritable autoroute de commerce humain qui a causer des morts innombrables et pas moins cruelles que celles des animaux. L'histoire de Porcelaine m'a fait penser aux camps, où il y a avait cette glaçante et déshumanisante façon de diminuer les gens au rend de "marchandise", à utiliser avec acharnement jusqu'à ce que mot s'en suivre. C'est à croire que l'appât du gain et l'envie de pouvoir rendent totalement aveugles les moins empathiques d'entre nous. Et nous ne sommes pas moins responsables si nous ne faisons rien. Au moins, commençons à y réfléchir sérieusement. L'histoire en elle-même est relativement courte, divertissante à sa façon avec tous ces personnages animaliers fort colorés et de toutes espèces. Il y a même de vieux sacres comme "cibole". Les témoignages sont bouleversants, certains constats sont crus. Les animaux ne sont pas dupes de leur avenir, mais se demandent si malgré leur vocation, il n'y a pas moyen qu'on les traite avec un minimum de dignité. Une dignité que nous, sapiens, sommes les premiers à vouloir ( et à ne pas toujours obtenir). Il y a plusieurs angles de réflexions, il y a donc de la place pour le débat et plusieurs réalités se chevauchent. L'idée n'est pas de dire que tout est noir ou blanc, au contraire. Et puis, les animaux le disent eux-même, leurs humains les traite bien, ça existe. Je pense que ce genre de roman n'a pas vocation à être moralisateur autant que de dégager un enjeu réel trop souvent tassé dans un coin, parce que c'est plus accommodant pour tout le monde. La réalité est que les animaux ne peuvent pas le faire ce fameux "tribunal pénal des espèces", mais on est en droit penser que s'ils le pouvaient, ce ne serait pas un joli tableau qu'ils feraient de nous. Le même grief pourrait être employé de la part de tout ce qui vit sur cette planète, d'ailleurs. Je pense que là est le point de départ: se regarder, se demander su cette situation nous convient et si elle s’inscrit dans nos valeurs, s'il n'y a pas une petite part que nous pourrions faire pour changer les choses, puisqu'il faut bien un début à tout. Pour ma part, je suis suffisamment ébranlé pour envisager des changements dans mes habitudes, un petit pas à la fois. Bref, un petit roman qui bouscule, avec le grain efficace et atypique que je connais de Monsieur Bouchard, qui ne raconte aucune de ses histoires de la même façon. Un peu comme Jean-Claude Mourlevat l'avait amorcé avec sa série "Jefferson" , l'auteur québécois donne pour sa part, un nouvel angle au sujet de la traite des animaux, surtout pour plaider un meilleur traitement pour eux. Pour un lectorat adolescent, à partir du 1er cycle secondaire, 12-15 ans . **Certains passages sont poignants et pourraient heurter la sensibilité de certain.e.s lecteur.lectrices, mais il n'y a pas de passages particulièrement "graphiques" ( abondement détaillés).