Shaynning
Libraire @ Librairie Monet
Intérêts littéraires : Biographies, Jeunesse, Littérature, Psychologie, Arts, Bande dessinée, Loisirs

Activités de Shaynning

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Aventures et sagesses du village de Zamboki

Par Boucar Diouf
(4,5)
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Incontournable Août 2023 Boucar Diouf, biologiste, océanographe et humoriste québécois d'origine sénégalaise, nous offre un quatrième livre pour le lectorat jeunesse, toujours teinté de cet amour pour la nature et sa sagesse, inspiré par ses aïeux. Dans le village fictif de Zamboki, situé en Afrique, nous croiserons la route de trois jeunes, Lameki, Tamboula et Madalisso, qui ont chacun.e leur enjeu. Avec Lameki, devenu joueur de soccer de calibre mondial, il sera question de sa jeunesse, dans laquelle il se faisait intimider à répétition en raison de sa petite taille, à un point tel qu'il a envisagé de se déscolariser. Heureusement, la matriarche du village possède des astuces et des allégories fort pertinentes, notamment celle du baobab, cet arbre qui a forcément été petit un jour. Tout comme cet arbre impressionnant une fois adulte, nous commençons tous à l'état de petite graine, qui aura besoin de temps pour croître. Avec Tamboula, qui aimait chanter sous le baobab en forme d'éléphant de son village, il sera question du talent, qui, à l'instar du diamant brut, est bien plus beau quand il est poli. Il faut plus que du simple talent pour progresser, il faut de la rigueur, du temps et de la discipline, un peu comme ce musicien fort apprécié à Zamboki, qui ne comptait plus les heures de pratiques, et est aujourd'hui reconnu. Avec Madalisso, le narrateur principal, il sera question du fossé entre croyance et science. Il est une croyance, dans le village de Zamboki, qui laisse croire que les geckos, ces petits reptiles acrobates, œuvrent pour rendre les gens malades, en urinant dans leur nourriture. Les petits reptiles seraient sous l'emprise d’esprits malveillants et font l'objet d'une chasse cruelle dans le village. La maman de Madalisso y croit fermement. Cependant, en amoureux des vivants, Madalisso compte bien lui faire changer d'avis, quitte à prendre certains risques scientifiques. La science exige des preuves, après tout. Devenu adulte, il travaille en tant que biologiste et continue d’œuvrer à faire changer les mentalités pour que cesse les maltraitances envers les animaux, dont les geckos. Trois histoires touchantes, qui ont toutes en commun d'avoir la matriarche du village comme source de sagesse, comme vous pouvez la voir sur la couverture, auprès du baobab en forme d'éléphant. Il y aura d'ailleurs des illustrations au cours de cet ouvrage. J'ai beaucoup aimé le style teinté de douceur de monsieur Diouf, qui défend les causes qui sont les siennes, même dans ses spectacles d'humour. C'est un habile orateur et maintenant que je vois son habile plume servir la littérature jeunesse, et c'est tant mieux! Un livre pertinent et instructif, dans un paysage africain encore trop rarement représenté en littérature jeunesse, qui aura des échos chez bien des jeunes lecteurs et lectrices, je pense, au regard des enjeux climatiques actuels, mais aussi des enjeux propres aux enfants et aux ados. Pour un lectorat intermédiaire du 3e cycle primaire, 10-12 ans+, mais qui peut tout-à-fait convenir aux 8-9 ans habiles en lecture qui auront envie de s'y aventurer.
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Le voyage de Trog

Par Puno et Marta Altés
(4,0)
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Incontournable Novembre 2023 Un sympathique petit roman espagnol ( pas courant cette origine, en littérature jeunesse), dans la collection de romans intermédiaire "Zazou", dans un décor qui est inspiré du paléolithique. Trog vient d'une communauté, les "invisibles", qui ont un rituel initiatique pour les garçons appelé "Le Voyage", qui consiste à rejoindre un endroit précis pour y chasser une proie et la ramener. Néanmoins, la jeune Trog est une excellente élève, elle brille dans tous les domaines et aime apprendre la culture des autres communautés. Quand un mammouth est rapporté ai village, le Chef propose un défis aux garçons qui feront le prochain voyage: Grimper sur une défense et récolter la belle pièce de viande piquée à son extimité. Il a à peine le temps de finir sa phrase que Trog s’empare du trophée. Dès lors, il est question pour Trog se faire ce voyage qu'elle avait déjà verbalisé vouloir faire. Soutenue pas sa famille et par les femmes de son village, Trog s'engage dans une voyage qui changera sa vie, sa vision du monde et même la technologie de son époque. Le roman prend place dans un univers qui rappelle celui des humains préhistoriques, mais on peut voir à quelques éléments que ce n'est pas historiquement crédible. On a, par exemple, un mélange d'animaux issus de divers continents qui vivent dans le même écosystème, et par la présence d'une certaine "magie", avec notamment la cape qui devient une boîte noire. Je pense donc qu'il s'agit de Fantasy plus que d'Histoire. Les personnages ont des noms amusants: Trog, Rnar, Rogl, Odi, Raa, Groo, Vern, Uur, etc. Des petits prénoms qui sonnent comme des onomatopées, fort amusants! Nous avons, en outre, des axes sociaux intéressants dans ce roman. Le premier et le plus évident est celui du féminisme ( soit l'égalité des genres). Trog se demande pourquoi les filles n'ont jamais eu l'opportunité de faire ce Voyage et les réponses sont un peu évasives. Il est bien sur question de la répartition des tâches, longtemps pensées en terme de facilité pour les femmes ( mais une récente lecture du livre "Les femmes aussi ont fait l'Histoire" de Titiou Lecoq souligne que le partage des tâches n'étaient sans doute pas aussi genrées que les Historiens teintés de biais machistes semblaient le croire). C'est toutefois dans ce genre d'univers genré que nous sommes ici. Les femmes font des bébés et s'occupent du logis, tandis que les gars chassent et explorent. Pire, le Politique est mené par les membres Invisibles ayant accomplis le Voyage, donc, conséquemment, que des hommes. Une situation injuste, qui ne tien compte que du sexe et non des habiletés. Heureusement, Trog, élève rapide, agile et bonne tireuse d'arc, possède toutes les qualités pour récolter le droit de participer. Et sa réussite créera un précédent. Cependant, dans la communauté, on a aussi un élément injuste du côté du "Chef". Plus habile chasseur, Vern s’est arrogé certains droits. Quand la communauté est passée d'un lieu en commun à des habitations séparés, dans un nouvel endroit, Vern s'est accaparé la grotte sur la colline et a même placé sur son entrée un trophée collectif: un crâne de mammouth. Il commence à devenir dangereusement le typique Gros Mâle alpha, cette construction sociale qui permet encore aujourd'hui à des hommes de se proclamer supérieur pour quelques kilos de muscles. Vern a aussi un vilain travers: son favoritisme pour son fils, Rnar. Attention, à partir d'ici, il y aura des divulgâches. Rnar c'est le personnage masculin qui se croit au-dessus de tout en dépit du fait qu'il n'a pratiquement aucune forces. Fils-à-papa-du-Chef, Rnar a passé deux fois son Voyage, tous deux des échecs. C,est pourtant le premier à chigner sur la participation de Trog, mais on va découvrir qu'il est lui-même peu digne de faire ce voyage. Paresseux, tricheur et menteur, pauvre Rnar, il a pas beaucoup de mérite cet ado. Devant le succès de Trog, cela dit, il a épuisé la réserve de patience de son père et ce dernier ne digère pas que son fils ait en plus tenté de discrédité Trog, qui revient avec un trophée ET un début de livre. Car c'est bien ce que ramène Trog: Une encyclopédie. Comment y est-elle parvenue? Après avoir traverser les divers lieux connus dans la chanson qui décrit le "voyage", Trog découvre que sa cape qu'elle a trouée accidentellement, renvoie des images miniatures de ce qui se déroule autours d'elle, à la manière d'une Boîte noire. Elle en a profiter pour dessiner fidèlement des dizaines d'animaux qu'elle n'avait jamais vu. Ces dessins, réalisés sur des pierres, iront rejoindre les parois de la grotte du sage de la communauté, leur répertoire visuel encore fort peu avancé ( du au déménagement). Vous trouverez dans le roman plusieurs "inventions" totalement anachroniques, mais amusantes. Trog n'est donc pas seulement agiles, dégourdie et polyvalente, elle est aussi astucieuse. La jeune fille possède également devenue amie avec un grand chien blanc, Gris ( Hein?) , rencontre une étrange communauté d'Hommes de boue, crée des outils et vient à bout d'un ours féroce, dont elle récupère les canines. Il y a de l'action dans ce roman! On est mené dans toute sorte de lieux, avec une jeune fille courageuse qui reste cependant pragmatique. Mention spéciale à Groo, l'un des plus vieux personnages et sage du village, qui sert de prof et qui croit au potentiel de Trog. Et il a un look de chaman. J'ai trouvé très amusants les "choses pas encore inventés" comme le "Bonjour" ou le "Au revoir" remplacé par le prénom de la personne, ce qui, quand on porte un nom qui ressemble à une onomatopée, fait de drôles d'échanges: "Pa! Ma! Trog! Groo! Uur! Héhé. Comique. Aussi, c'était bien amusant de voir Trog manger des bestioles, même une grosse araignée, surtout avec les clichés de filles qui tourne de l’œil au moindre petit insecte. Et puis, c'est cohérent: des insectes, ce sont des protéines. Le livre en lui même est visuellement accrocheur, avec des illustrations dans le thème de la préhistoire, avec une belle diversité de couleurs de peau et une palette de couleur sobre et tournée vers les bruns qui me rappelle le choix de palette de couleur de Jon Klassen. Il y a des dessins aux pages de chapitres, et ces derniers sont très courts ( idéaux pour les Lecteurs moins patients). Les personnages sont présentés sur les deux pages de garde avec leurs noms. Je sors vraiment divertie de ce petit roman intermédiaire, dans un univers que j'ai peut vu et qui a trouvé le tour de traiter beaucoup de choses en peu de temps. Trog est un personnage vraiment facile à apprécier et j'espère que les parents laisseront la chance à leur garçons de rencontrer ce personnage féminin ( parce qu'on ne laisse pas les garçons lire sur des filles aussi facilement que les filles lisent sur des gars., hélas). Un roman en tome unique, pleins d'action, pleins de clin d’œil aux inventions, à l'importance de rester soi-même et de ne pas accepter le statu quo, surtout s'il nous entrave dans la réalisation d'un projet d'émancipation personnel. Enfin, j'ai trouvé charmante cette communauté, qui a su surmonter une injustice sociale et la famille de Trog, qui n'ont pas hésiter à la soutenir quand ils ont réalisé à quel point Trog voulait faire le Voyage. Pour un lectorat intermédiaire à partir du 2e cycle primaire, 8-9 ans
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L'année perdue : Ukraine 1933

Par Katherine Marsh
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Sapi le sapin

Par Olivier Tallec
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Incontournable Décembre 2023 Ah, monsieur Tallec et ses histoires! Chaque nouvel album est une pépite de pertinence. Après un album sur la surconsommation, sur l'égoïsme territorial ou encore sur l'insatisfaction personnelle, voici un album teintée d'enjeu environnemental et de rêve de gloire déçu. Sapi est un petit sapin cultivé en monoculture quelque part dans le Nord européen, en Suède. Une fois replanté en forêt, après une enfance passée sous la surveillance étroite et contraignante des humains, Sapi vit dans l'ombre des vieux arbres, si grands qu'ils accaparent toute la lumière. Néanmoins, notre petit sapin voit grand: Il veut être en pleine lumière et pas n'importe laquelle: Celle des décorations scintillantes et des boules colorés des sapins de Noël. Des rêves d'apparats pleins la sève, Sapi se sort de la terre forestière pour aller trouver meilleure fortune en ville, dans le monde des humains. Il se tient immobile sur un pignon de rue et le voilà rapidement emporté par une femme. Une fois à la maison, il est richement décoré et est tout fier de son apparence. Toutefois, supporter toute cette déco l'épuise et il s’assoupit pour la nuit. Au matin, c'est le bazar. Des enfants déballent frénétiquement les cadeaux, il y a du mouvement à un tel point qu'il en a le tournis. Et puis, déjà, le réveillon est passé. Un peu morose, Sapi tient entre ses branches une dernière boule de Noël, en se disant que Noël devrait quand même durer plus longtemps qu'une seule journée. Il est ensuite replanté dans la cour, près du saule ( qui a l'air mort à en juger par son absence de feuilles). Sapi garde sa boule de Noël durant les prochaine saisons, en attente du Noël suivant. Mais ce qu'il obtient est tout autre: On plante un nouveau petit sapin à côté de lui. Un petit sapin ayant une guirlande dorée. J'aime vraiment beaucoup les autrices et les auteurs qui s'amusent à nous placer des enjeux en formule vulgarisée dans les albums jeunesse. On peut aborder des enjeux sérieux et des réalités dont même les adultes peuvent se sentir concernés, dans les albums jeunesse, n'en déplaisent aux snobinards qui croient encore que la littérature jeunesse est une sous-littérature. Voici ce que j'en ai comprit et extrapolé. D"une part, je ne peux pas passer à côté de la présentation de Sapi, arbre produit en monoculture, qu'on a surveillé, obligé à peigner ses épines, à se tenir droit et éviter de trop s'abreuver au risque de jaunir. Deux éléments à retenir: Primo, la monoculture est rigide et néfaste. Elle met à risque les plantes qui ne jouissent pas des bénéfices d'autres plantes pour survivre à leur environnement et des épidémies de maladie y font des ravages car rien de peut entraver son déplacement. Et on sent que la présence humaine a quelque chose "d'autoritaire", comme s'ils étaient là pour s'assurer de rentabiliser les arbres, pas d'en prendre soin. Après quelques recherches, je réalise que le Québec et la Suède ont les mêmes enjeux de reforestation à faire, mais que la Suède se targue de son modèle réussi. Pourtant, quelques journaux ne tiennent pas d'éloges sur leurs pratiques, essentiellement des monocultures expéditives, qui sont à la fois fragiles en terme de diversité dans l'écosystème, mais aussi incapables de reforester les hectares perdus. La réalité est que la Suède a des forêts clairsemée fragiles aux changements climatiques [ Source: Le Temps, "En Suède, la forêt manque de naturel", en ligne, 4 avril 2021] Ce qui me mène au deuzio: Je me permet de retrouver dans cet arbre nos jeunes, soumis à beaucoup d'attentes et de pression: lit, étudie, travaille, paresse pas trop, rentabilise tes frais d'école privée, soit beau/belle, soit intelligent.e, etc. D'autre part, Sapi a un rêve, un rêve qui lui fait quitter sa forêt lugubre pour aller chercher sa bonne fortune ailleurs. Il rêve de paillettes, de lumière, d'être au centre de l'attention, bref, d'être une star! Mais Sapi déchante, en fait. Oui, il a aimé ses décorations, mais il a fini par s'endormir sous leur poids. Puis, son contact avec les enfants l'ont carrément étourdi, ce qui l'a encore une fois épuisé. Mais surtout, Sapi fait un constat concernant Noël , ça ne dure qu'une journée. Finalement, devenir un sapin de Noël semblait bien mieux en rêve, surtout que Sapi fini replanté dans la cour, exposé aux intempéries. Au moins, il a du soleil cette fois. Il garde avec lui une boule de Noël rouge. Trois saisons plus tard, malheureusement, Sapi se retrouve avec un petit compagnon. On devine ainsi que Sapi n'a pas renouvelé son statut de sapin de Noël: Un autre petit sapin rêveur en a été la vedette, en atteste sa guirlande dorée autours de lui. Même un adulte peut retrouver de quoi cogiter dans cette histoire. On peut penser à tous ces gens qui rêvent de gloire et de réussite facile et qui se heurte à la réalité, pas toujours à la hauteur de leurs attentes. On peut aussi penser à ces gens qui vont connaitre ce que les anglais appellent un "one-hit-wonder", un succès instantané, bien souvent aussi stupéfiant que douloureusement éphémère. Finalement, ces gens peuvent rester dans l'expectative de nouvelles gloires, comme Sapi avec sa boule rouge, mais rien ne dit que ce sera le cas et qu'une tierce personne ne tiendra pas cette place qu'ils estiment mériter. Je le trouve sombre cet album, et tout ce noir en arrière-plan de la couverture tout comme l'album lui-même renforce cette impression. C'est audacieux pour un album de Noël, mais évidemment, l'amatrice d'atypiques et de sujets pertinents adore cet aspect. Et puis, même si Sapi est désenchanté, reste qu'il a quitté sa forêt sombre, qu'il a accomplit son rêve et qu'il est maintenant dans une cours où il a tout le soleil pour lui. Mais je devine à sa mine grognonne qu'il n'en est pas particulièrement heureux. J'aime penser aussi à tous ces petits garçons qui, comme Sapi, se rêvent sur la scène, pailletés et admirés, mais qui vont devoir surmonter les jugements de nos sociétés encore trop machistes. Également, je ne peux m’empêcher de percevoir la dimension de l'album mettant en scène le côté expéditif de Noël de nos jours, au même titre que bien des aspects de notre vie. Un rythme de vie effréné, sans prendre le temps de savourer, même pour cette fête de famille. Côté graphique, les couleurs côtoient le noir, les ombres côtoient le brillant et l'album est dans un grand format qui accentue la petite taille de Sapi par rapport à son environnement. Je retrouve les personnages mignons aux grands yeux ronds de l'illustrateur, leurs expressions parfois tragiques et attendrissantes et la Nature centrale. Encore un album profond, pertinent et divertissant, dont j'ai déjà hâte de présenter, aux professeurs, tout particulièrement. Je pense qu'au regard de ses implications et du certain niveau d'inférences à faire, notamment sur la fin, je le placerai en 1er cycle primaire ( 6-7 ans) plutôt qu'en préscolaire (4-5 ans), mais il va de soi que le 2e ( 8-9 ans) et le 3e ( 10-12 ans) cycle primaire devraient aussi se régaler de cet album sinistrement boisé noëllesque. Je vous met les liens des articles que j'ai lus pour pousser sur le sujet: https://www.letemps.ch/sciences/environnement/suede-foret-manque-naturel et https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/01/03/l-exploitation-intensive-des-forets-suedoises-remise-en-question_6156381_3244.html et https://ecotree.green/blog/scandinavie-les-forets-de-suede
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Samedi matin, rue des Colibris

Par Julie Bouchard et Olivier Chéné
(4,0)
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Incontournable Novembre 2023 Un album de la maison D'Eux créé en collaboration d'une autrice québécoise, madame Julie Bouchard, qui s'essaie à l'album jeunesse et de l'illustrateur a qui on doit le très sympathique "La carotte, la brute et le truand" . Un pari réussi, je dirais, pour ce grand album touchant et un peu mystérieux. Mystérieux, en effet! Mais que cherchent donc ce duo d'amis, Simon et Lucas, en cette bonne heure matinale? Alors que les tables se placent, que les voisins papillonnent entre les cartons et en sortent du pratique à l'inutile, babioles en tous genres et de toutes époques, notre binôme passent de tables en tables en cherchant quelque chose. Aux quinze minutes près, en compte croissant, nous voyons la rue Des Colibris se colorer dans le bazar estival des ventes de garages. Au Québec, on fait ça à date établies généralement. Comme ça tout le monde en profite! Mais laissons là les précisions, mais que cherchent donc ces garçons? Ils hésitent parfois à sortir leur argent pour un truc cool ou deux, mais ils semblent investies d'une mission. Ils cherchent un truc précis. Alors que le bouhaha est vraiment ambiant et que le temps passe, les amis tournent sur une nouvelle rue. Et cette fois, il trouveront ce qu'ils cherchent. Attention, divulgâche! Il s'avère que Simon a un chien, dont il laisse d'ailleurs la vieille carcasse sympathique à la maison, au début de l'album. Avec son maigre avoir financier, le jeune homme espère trouver quelque chose suceptible de pouvoir amener son précieux compagnon à poil au parc, comme autrefois. Dans cette optique, Simon déniche une pousette pour bébé horitontale, comme les vieux modèles des années 50. Poussette jouet ou antiquité, qu'importe, l'important est de pousser le chien dans le parc, puisque celui-ci, visiblement, ne peut plus marcher. Avouez que c'est touchant! Un album sur l'empathie envers son animal de compagnie âgé, c'est un thème relativement rare. On y voit un accommodement et en plus, on casse le stéréotype du garçon stéréotypé en lui faisant manipuler une poussette. Ce qui est aussi notable avec cet album est la présence d'un compte numérique du temps, à la manière d'une enquête policière. Une séquence chronologique chiffrée, c'est aussi très rare. Pour rester sur l'axe policier, on a ici une forme d'enquête dans la mesure où les enfants cherchent quelque chose et qu'on ignore quoi. Il y a donc du suspense, mais on a peu d'indices pour le deviner. Autre élément intéressant, nous avons des vues en divers plans. Certains sont frontaux, d'autres en plongé, certains très près et on recule progressivement. On a donc l'impression de reculer aussi, pour voir la rue se remplir de plus en plus. Toujours habile de ses crayons , Chéné nous offre un panorama riche en détail, très propre au niveau du traitement et au coloris adoucie par beaucoup de lumière. J'aime aussi le travail sur la diversité ethnique des personnages. Un détail qui a toujours son importance. Ce livre sur la vie de quartier propose même un Cherche et Trouve à la fin de l'album, pour les amateurs de détails qui auraient envie de prolonger le plaisir. Un autre bel ouvrage ajouté à la famille D'Eux, une excellente maison d'édition pour les albums jeunesse. Pour un lectorat à partir du second cycle primaire, 8-9 ans+.
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Contes à rebours

Par Suzanne Lebeau
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Incontournable Théâtre 2023 Il faut croire que cette année 2023 doit recevoir sa dose de théâtre parce que je me retrouve avec pas un, pas deux, mais bien TROIS incontournables en théâtre jeunesse québécois. "Contes à rebours" est un recueil de courtes pièces ayant en commun d'avoir un enfant comme personnage central, la majeure partie narrée au "je". Il s'agit d'une réédition, sa parution date de 1997, mais reste pertinente actuellement. Je dois dire que je ne suis pas experte en théâtre, un univers que j'ai peu connu, mais que j'ai aimé pour les quelques pièces que j'ai eu la chance de voir. Dans son format papier, donc, je ne dispose pas des codes et des termes pour en dresser une fine analyse. Enfant, qui voit sa mère les négliger, lui/elle et sa fratrie, au profil d'une bouteille de vin caché sous la table. Enfant hyperactif, qui a hâte de bouger et de vivre, dont les parents on du mal à suivre, et pourtant, le voici déjà scolarisé. Enfant ayant vu son papa entrer en prison, parce qu'il a commit un meurtre par compassion pour cette grande sœur souffrante depuis la naissance. Enfant de maman monoparentale qui apprend à se gérer seule dans le grand appartement, entre ses imaginaires de jeune fille et les peurs infantiles qui font grandir. Enfant qui a un parent avec un trait de personnalité limite, qui suit ses caprices et ses envies sans tenir compte de son fils, réorganisant sa structure familiale éternellement changeante au gré de ses envies. Enfant qui du haut de ses quatre ans tente de rétrécir les 3-4 mois d'écart avec ses cousines, à l'aide d'un secret. L'enfant né dernier qui aurait aimé être le personnage de sa propre histoire d'amour familial, mais qui, à défaut, se contente du papier, pour un jour écrire cette histoire. Le presque ado qui découvre le fantasme amoureux. La petite fille qui, soucieuse de suivre la consigne de ne pas sortir en classe, ne fait pas savoir que sa vessie menace de rompre. Enfants négligés, enfants et leur logique de tout-petits, leur vision singulière, enfants en mal d'amour, qui se font tous petits, effacés, rempli d'espoirs déçus. Des enfants qui expérimentent des émotions nouvelles, heurtés parfois par des concepts trop grands encore pour eux. Des enfants vus de l'intérieur, avec leur poésie et leur candeur, piquée parfois d'égocentrisme, mais comment leur en vouloir, ils sont à cet âge tendre où on est intrigué par soi autant que par le monde autours. Il y a définitivement des thèmes adultes dans ces petits morceaux de scène, même s'il s'agit de théâtre jeunesse. Le second degré est parfois un peu trouble, mais on reconnait certains enjeux, on devine certains manquements. Surtout, on entre en empathie avec ses enfants qui n'ont rien de héros et héroïnes de roman, eux qui sont vulnérables, imparfaits et accessibles. Il y a quelque chose de si poétique dans la formule de théâtre, avec ses choix de mots qui deviennent des phrases, les non-dits qui deviennent des enjeux, des paroles anodines qui cachent des vérités pas bien jolies. Parfois sous forme de monologue, parfois en dialogue, ces histoires au rythme particulier ont une dynamique propre, parfois martelante, ponctuée de "je" en cadence , parfois coulant, presque essoufflant. J'ai aussi vu des répétitions, des échos, pleins de comparaisons. C'est riche et c'est simple, mais suffisamment ouvert pour qu'on interprète. Ces portrait d'enfants permet assurément de traiter des enjeux sociaux, de dresser des profils atypiques et de parler de certaines réalités. Aussi, je pense que vu leur diversité de forme, c'est aussi une belle œuvre pour illustrer les divers façon de raconter une histoire, surtout pour une pièce de théâtre. Je pense que certains passages plus abstraits auraient davantage de sens avec la présence d'un dramaturge et de son décor, mais de manière générale, c'est compréhensible. je serais très curieuse d'entendre les 8 à 12 ans s'exprimer sur ce que ces enfants leur évoque dans leurs propos. J'ai été particulièrement réceptive à cet enfant aîné d'une fratrie de trois qui a une maman alcoolique et qui se ment aussi surement à elle-même qu'à ses enfants, dont on comprend que le père ne sait sans doute pas que ses enfants ne mangent pas à leur faim et qu'ils sont confinés dans la maison sans vraiment s'y développer. L'histoire de ce petit dernier arrivé, on le sent, par accident, qui cherche désespérément un signe d'affection chez ses géniteurs, est aussi très touchante, surtout quand on comprend que c'est dans la fiction qu'il trouvera refuge. En outre, la maman instable qui se lasse de tout très vite et vit au gré de ses envies me laisse penser qu'on a un trouble de personnalité limite en action et c'est triste que ce soit son fils qui en pait les frais. Enfin, le meurtre par compassion est encore tabou dans le monde, mais il existe et il reste considéré comme un crime, cristallisant une vision rigide très chrétienne de la mort dans nos sociétés. "Ils sont petits mes héros, mais parfois leur peine est plus grande qu'eux. Ils ont rarement raison, mais leur épreuves, si elles sont moins terribles que dans les contes de notre enfance, reviennent tous les jours."Suzanne Lebeau Oui, voilà, ce ne sont pas des contes peuplées de loups et d’orges, aucun enfant ne meure, aucun enfant de connait la terreur viscérale. Il s'agit plutôt d'indifférences ordinaires, de loyauté envers son parent, de besoins non comblés. Des enfants qui se meurent pas petits feu ou qui resteront marqué par le manque ou l'humiliation, dans le silence. Quand j'ai lu ce petit livre, j'ai une pensée pour les enfants de la DPJ, pour les enfants "pas assez compromis" pour y être, pour mes petits voisins, pour qui des parents disponibles et aimant n'était pas un droit acquis. Voilà donc pourquoi le mot "Conte" est dans le titre. Des contes modernes et repensés pour mieux adhérer à certains enjeux, dont certains ne datent pas d'hier. Ah et comme dans les contes classiques, il y a présence de sexisme, surtout dans les tâches genrées. C'est un tour d'horizon de personnalités et d'enjeux en tout genre qui se déploie dans ce petit recueil et ce fut une incursion aussi touchante qu'intrigante. Pour un lectorat du 3e cycle primaire, 10-12 ans.
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Ecoute la baleine chanter

Par Elodie Chan et Anthony Martinez
(4,0)
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Incontournable Novembre 2023 Un roman, membre de la fratrie "Mouche", de la maison d'édition École des Loisirs, qui a des parfums d'embruns et un air marin, dans lequel deux oiseaux et leurs alliés s'embarquent pour le sauvetage d'une jeune baleine. Frida la mouette, amatrice de lecture, découvre un matin qu'une petite baleine est devenue orpheline, sa maman ayant ingéré trop de polluants plastiques, ce qui l'a achevée. Il faut faire regagner au baleineau le grand large rapidement, autrement elle pourrait finir pêchée par les humains. Frida peut heureusement compter sur son ami de longue date, le macareux Lekni. Après une première tentative pour nourrir la petite baleine ( mais quelle quantité il faudrait!), Frida et Lekni cherchent de nouvelles options, ce qui les conduiront vers des rencontres singulières. C'est ainsi que commence une grande aventure pour sauver la petite baleine. La première chose qui m'a marquée de cette histoire est le travail autours des personnages. le roman étant illustré, on a en plus la chance de les voir et les illustrations rendent bien le côté "coloré" de ces personnages atypiques. Il y a Copernic le mouton, dont le dense lainage noir est truffé de bidules en tout genre. Il lit l'avenir dans les tas de crotin et se prend bien trop au sérieux. Vient ensuite les trois Charly Schlingue, Schinck et Schlass, chats pouilleux à la mine patibulaire qui rêvent de se repaitre de la viande de la baleine et constituent les principaux antagonistes. Juste après avoir rencontré un phoque à la jolie moustache en forme de moustache, qui aime les roulades et leur confie que les baleines "chantent". Quand au cacatoès pirate Carlos Felipe Tercero, un peu narcissique sur les bords, dont la houpette frivole et la patte coupée le caractérise, c'est le personnage qui permet la rencontre du seul humain embarqué dans le sauvetage, Minus, enfant qui aime les étoiles et possède le pédalo traficoté qui va servir la mission. Grâce au concours du cacatoès pirate et du jeune humain aimant les animaux , le duo d'oiseaux vont parvenir à guider les jeune baleine, notamment avec un phonographe. Une histoire simple, mais efficace, avec des animaux hauts en couleurs et un fond d'enjeu environnemental, appuyé de jolies illustrations. Pour un lectorat intermédiaire à partir du second cycle primaire, 8-9 ans.
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176 pas

Par Fanny Britt
(4,0)
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Incontournable Théâtre jeunesse Novembre 2023 Après avoir lu le sympathique "Furioso", d'Olivier Kemeid, de la collection Théâtre de la maison Léméac lui aussi, je me suis lancée dans "176 pas", de la québécoise Fanny Britt. J'ai toujours un petit baume au coeur quand un livre sur le théâtre nous parvient en librairie, non que je m'y connaisse, mais nous en recevons généralement peu. Si on exclut les maison étrangères "École des Loisirs" et "Lansman", qui en produisent beaucoup, du côté québécois, Léméac est une des rares à couvrir ce pan de la littérature jeunesse. Alors, qu'avons-nous? Un duo en contraste, qui semblent dissemblables au début, mais qui ont un enjeu commun: affronter leurs craintes, et surtout, qui doivent apprendre à écouter. Octave, jusque dans son prénom, gravite dans un univers strictement musical, où sa passion pour le piano reste cependant cantonnée à un répertoire "classique" , en ce sens où il est encouragé à rester dans les oeuvres des grands compositeurs ayant fait leurs preuves. Il n'y a pas de place pour la créativité ou l'expression spontanée. Dans son cadre familial, il est conservé dans un cocon sous une mains maternelle sévère, un brin austère, qui a aussi une certaine tendance à la manipulation avec ses encouragements teintée de dépréciation ( Elle me rappelle un peu la Mère Gothel de Disney cette femme). On comprendra que cette maternité suffocante et auto-centrée cache un enjeu du côté de cette maman. J'y reviendra dans ma partie divulgâchante. Dans sa famille nombreuse, dont les frères portent des noms à saveur océanique ( Notez Pacifique, comme l'Océan, Ariel, comme la Petite Sirène, Ulysse, comme le Héro grec ayant voyagé en mer 10 ans de temps, Titouan, comme le navigateur français), Delphine ( comme le bleu de Delph) est fille de pêcheur et son habileté physique lui permet de grimper aux arbres, courir les plages et parcourir le monde, au contraire d'Octave, confiné chez lui. Delphine aime chanter et aime pêcher, mais elle ne va plus à l'école. Il y a quelque chose de libre chez elle, mais en fait, tout comme Octave, il y a quelque chose qu'elle redoute. Deux enfants, donc, qui a priori, ne se ressemble pas. Octave manque d'imagination, prend tout au premier degré et respecte de manière scrupuleuse les règles établies par sa mère. Au contraire, Delphine est fantasque, audacieuse et évolue de manière plus indépendante. Ils se rencontre alors que Delphine fait une livraison de poisson chez lui. Il est à son piano, elle est debout avec sa chaudière pleine de poissons. Un peu maladroitement, Octave tente de faire la conversation et devant son interrogation, à savoir si son piano est triste de ne pas avoir de nom, se rétracte aussitôt en soulignant que ce genre de réflexion explique pourquoi il n'a pas d'amis. Delphine le surprend alors en demandant directement au piano si ça la rend triste de ne pas avoir de nom. La franchise de Delphine lui fait dire qu'elle trouve Octave étrange, ce qu'il admet volontiers. Mais il trouve tout aussi étrange cette fille qui parle de s'asseoir sur des nuages et qui grimpe aux arbres. C'est une rencontre qui aurait ou n'aboutir sur rien, mais qui va malgré tout avoir une suite, grâce à la tante d'Octave, qui aime se faire passer pour la chauffeuse d'Octave et qui décide de reconduire Delphine dans sa "bagnole". Les deux enfants vont vivre quelques péripéties marqué par des débats, des monologues, parfois un dialogue de sourds, tantôt intrigués l'un par l'autre, tantôt éludant fréquemment les propos qui ne les intéressent pas. C'est pas facile quand on veut que l'autre s'accorde à nos intérêts, c'est pas facile quand on a des visions opposés ou qu'on a des réalités familiales différentes. C'est l'histoire d'une amitié balbutiante, où les deux personnages apprennent à s'ouvrir à l'autre, entre défense et attaque, entre pétillant et amertume. S'ouvrir à l'autre implique de se montrer vulnérable et s'ouvrir à l'autre implique de la confiance. Progressivement, ils déteignent l'un sur l'autre et peu à peu, questionne leur a priori et baisse pue à peu leur garde face à l'autre. Octave se détache un peu du cocon de sa mère. Delphine tente de lui faire partager son univers, mais Octave se rétracte une fois encore. C'est donc lui qui tente de reprendre contact avec Delphine. Attention, à partir d'ici, il y aura des divulgâches. La présence de tante Simone est majeure pour le personnage d'Octave, parce qu'elle a un rapport au réel différent de la mère de ce dernier. Elle "pousse" Octave a oser, mais c'est aussi elle qui va livrer le mystère derrière sa mère. Plus jeune, tante Simone et la maman d'Octave étaient des jeunes filles intrépides et espiègles qui avaient fait les 400 coups. Comment expliquer alors que cette maman est devenue si couvante envers son enfant? Octave apprend que son père est décédé dans des circonstances tragiques, dans un accident d'auto où il serait resté prit dans le véhicule projeté sous l'eau , après avoir détaché et confié son fils à son épouse. Il s'y serait noyé. C'est de cet évènement traumatique que la maman serait restée marqué et serait devenue méfiante et insécure. La tante amène un aspect que j'ai beaucoup aimé, à savoir la fonction de la peur. La peur est une émotion, elle a donc un rôle à remplir, une fonction, mais comme toutes les émotions, elle peut être envahissante. Néanmoins, comme toutes les émotions, elle s'apprivoise, on peut apprendre à la gérer. L'idée n'est pas de ne pas en avoir ou pire de la cacher, elle sera toujours là et tant mieux, car elle assure notre survie et calibre nos comportements, surtout ceux qui nous mettent à risque. Surtout, sans peur, il ne saurait être question de courage. Comme le dit Simone, on peut apprendre à la faire rétrécir et la loger dans une poche. Elle prend ainsi moins de place, mais elle nous accompagne toujours. Ainsi, Octave comprend que c'est sa peur qui lui fait sans cesse reculer devant la nouveauté et donc, face à Delphine, ses idées et ses propositions. C'est aussi la peur qui lui cause l'inconfort qui le prend en voulant quitter l'enceinte de sa maison. Arrivent enfin les fameux 176 pas. 176 pas de peur qui se mute en courage. On assiste pas à pas au changement psychologique et physique ( signes somatiques) d'Octave, qui quitte l'enceinte de sa maison pour aller rejoindre Delphine sur la plage. Il lui confie qu'il se sent comme une patate qu'on a oublié de cueillir à côté d'elle qui ne craint rien. C'est alors qu'elle lui confie sa propre crainte. Durant la pièce, on entend une histoire sur une jeune fille aux cheveux rouges, qui sans ses jambes fonctionnelles, a cependant une agilité à la natation. Dans l'eau, son handicap disparait. Cette histoire est le fruit de l'imagination de Delphine, qu'elle a récité en classe. Néanmoins, Delphine a fait appel à sa mémoire, car sur le papier, les lettres sont pêle-mêle et inadéquates. On comprend que la jeune fille a probablement un trouble d'apprentissage, qui lui a valut des moqueries et ultimement, elle fut déscolarisée. Depuis, elle craint de lire, ce qui explique pourquoi elle a refusé de lire une partition, au début de la pièce. Pour reprendre les mots d'octave: "Donc, ce que tu me dis, c,est qu'on est deux patates?" Oui, deux "patates", deux enfants différents, à leur façon, deux enfants qui ont eu peur et qui ont vécu la solitude pour cette raison, Octave confiné chez lui, sans amis, Delphine sur sa plage sans amis. Deux patates qui parviennent à s'ouvrir l'une à l'autre et même rêver d'un même coeur. Deux enfants qui s'excusent et qui vont de l'avant. La peur n'a pas disparu, elle a simplement rétrécie. La pièce est une pièce de marionnettes dont voici le lien au Théâtre de l'Oeil: https://www.theatredeloeil.qc.ca/production/176-pas/ La présentation visuelle doit mieux le mettre en relief, mais il y a présence d'origami dans cette histoire. On le sent dans la descriptions dynamique et très "pliée" de certaines figures parallèles ou non à l'histoire, comme le bonzaï de tante Simone ou le passage sur les animaux dangereux. le papier et les changement de formes constituent des éléments artistiques très intéressants car ils ajoutent un aspect visuel à des concepts abstraits, ce qui, pour un auditoire plus jeune, est toujours pertinent à ajouter. Reste qu'à l'écrit, on peut se le figurer, mais je pense que c'est moins évident à faire que sur la scène. C'est une belle histoire, très porteuse, curieusement atemporelle, mais universelle, où l'émotion de le peur est explorée dans un sens très positif et où l'amitié est célébrée dans sa diversité. C'est un univers en chansons, en poissons, en papier et en espoirs. La pièce est destinée à un auditoire de 6 à 10 ans, mais pour sa version écrite, je le place en deuxième cycle primaire, 8-9 ans, parce qu'il faut savoir la lire.
Shaynning a apprécié, commenté et noté ce livre

Magique Péri T.7 : Incognito chez les mortels

Par Fabienne Blanchut et Ariane Delrieu
(4,0)
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J'aime toujours autant la série de Péri, toujours bien écrit, toujours bien illustré, mais qui cette fois, s'inverse un peu pour entrer dans le monde des "limités", c'est-à-dire, nous autres, non-sorciers. Péri se porte cette fois encore au secours de son "âme jumelle", Léonore, alias "Léo", la mi-sorcière qui a du retrouver son monde le temps d'être majeure et de pouvoir intégrer le monde des sorciers que l'on a pu découvrir dans le tome 5. Péri, sa mère, son père, sa grand-mère et son familier Farrow doivent donc se fondre dans le paysage le temps d'une mission au pensionnat où vit Léonore. Avec des noms d'emprunts, des vêtements inspirés de la famille royale britannique et un corbeau métamorphosé en chien saucisse, le clan de Péri quitte Sale-Frousse, pour le pire et le meilleur. Les aventures de Péri sont de courtes aventures, c'est ce qui est chouette, spécialement pour mes jeunes lecteurs et lectrices qui aiment la Fantasy, mais pas les pavés, nombreux dans ce genre. Péri, dans son kangourou rose, ses jeans et ses bottes militaires qui ressemblent à des Doc Martens, a aussi un pseudo qui me fait particulièrement plaisir car il s'agit du prénom de la petite sorcière désormais bien connue Pétronille, héroïne d'une série québécoise de la maison Druide et dont je fais régulièrement un parallèle avec la série de Péri, puisqu'elles sont établies dans le même groupe d'âge en terme de lectorat. Ça me fait donc plaisir que Péri face ainsi un clin d'oeil à Pétronille, même si je me doute que l'autrice connaisse la petite sorcière entrepreneure aux cheveux mauves. Mention spéciale à cette jolie scène entre Péri et son majordome squelette , personnage que j'aime tout particulièrement pour sa tendresse et sa loyauté. Mention spéciale à la mention à la famille Adams, la plus célèbre famille de l'univers "Ténébreux Sympathique". Pour un lectorat intermédiaire du 2e cycle primaire, 8-9 ans
Shaynning a commenté et noté ce livre

L'alphabête

Par Jean-Pierre Davidts et Marie-Sol St-Onge
(4,0)
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Incontournable Poésie jeunesse Novembre 2023 Après avoir découvert le sympathique "Alphabet rapaillé" de la même maison d'édition, Soulières, voici un autre abécédaire humoristique et poétique pour le lectorat intermédiaire, cette fois sur le thème des animaux. 26 prénoms d'enfants qui ont 26 animaux ( dont 1 est imaginaire, celui en "X"). 26 lieux également, qui n'ont pas forcément rapport avec le pays ou la région d'origine des animaux. Néanmoins, à la fin du recueil, vous trouverez un petit répertoire où vous seront donnés les lieux d'origine réels des animaux, ainsi que le pays où se trouve les lieux mentionnés. Je donne par exemple la lettre U ( parce que c'est une lettre mal aimée et peu représentée!): L'urubu d'Ulric Ulric a un urubu d'Ulsteinvik. Ce vautour à la tête rouge brique a travaillé toute sa vie dans un cirque à voler en cercles concentriques autour d'un clown énergique qui effectuait des pirouettes acrobatiques. [ À la fin] : L'urubu: Amérique du Nord, Amérique du Sud [ À la fin] Ulsteinvik: est une ville de Norvège ( Europe) Voici la liste des animaux: L'alligator d'Anthony Le boa de Bruno Le cacatoès de Cathy Le dromadaire de Désiré L'éléphant d'Emma Le fourmilier de Fabio La gerboise de Gaston Le hamster d'Héliane L'impala d'Igor Le jaguar de Jacqueline Le kangourou de Kenzo Le lama de Lilou La marmotte de Madeleine Le nasique de Narcisse L'ours d'Olivier Le panda de Patricia Le quiscale de Quentin Le rhinocéros de Rosalie La souris de Sybille La tortue de Théo L'urubu d'Ulric La vache de Victoire ( *Il fallait bien une vache parce que c'est le nom de la collection: Ma p'tite vache à mal aux pattes) Le wombat de William Le xipatafipon de Xavier Le yak de Yolande Le zèbre de Zahira Les poèmes sont rocambolesques, avec des animaux qui ont des hobbies humains, des préférences cocasses et toute sorte de profils de personnalité. Le tout est en rimes et chaque animal présente son illustration avec son animal et sa lettre de référence, en noir et blanc. J'aime bien ces petits recueils dédiés à la poésie dès le second cycle primaire ( 8-9 ans), car ils sont accessibles, faciles à consulter et propose quelque chose de ludique qui rend la poésie accessible autant aux débutants qu'aux initiés. Ils peuvent aussi servir le 3e cycle primaire, incluant les classes d’accueils en francisation ou encore les classes d'adaptation scolaires pour les enfants ayant des difficultés d’apprentissage. Pour un lectorat intermédiaire du deuxième cycle primaire, 8-9 ans+
Shaynning a apprécié, commenté et noté ce livre

Chen

Par Aurélien Ducoudray et Antoine Dodé
(4,0)
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Une Bd assez perturbante, je dois dire. Je constate que parmi les commentaires, si on soulève l'objectivisation extrême du corps de la femme, personne ne semble avoir souligner le phénomène pour les hommes. Dans ce monde où les femmes ne sont rien de plus que des utérus, la question se pose: que deviennent alors les besoins sexuels de 99% du reste de la population? Certes, si quelques rares femmes sont prostituées, reste que dans ce contexte, il faut alors se tourner vers les hommes. Nait alors une sorte d'interclasse de genre, des hommes travesties en femmes, mais ayant le rôle sexuel qu'on leur prête également. Chen en est d'ailleurs devenu "une", pas vraiment pas choix. Il y a donc une dimension de violence sexuelle au masculin dans cette histoire. La scène avec le jeune homme en peignoir rouge, qu'on a carrément sodomisé à mort, dans un viol collectif d'une vingtaine d"hommes, était particulièrement atroce, même si on ne voyait pas les détails de cette scène. le "propriétaire" de Chen l'a même empêché de porter secours à ce jeune homme, laissant la "meute" de mâles achever leur sinistre dessein et l'encourageant à "enterrer le corps", une fois son calvaire terminé.Le degré de déshumanisation de cette scène était terriblement glaçant. En outre, il illustre un phénomène non pas moins réel, celui des pulsions refoulées, qui a en outre expliqué pourquoi des milliers d'hommes d'Église ont violé des enfants, dont de nombreux garçons surtout, parce qu'on leur empêchait de vivre leur sexualité. J'imagine sans mal des exemples de part le monde qui illustre un contexte similaire. Qu'on le veuille ou non, les besoins sexuels existent et tout primaire qu'il soit, sont donc normaux. Ce qui l'est moins et c'est là l'horreur de la situation, ce sont toutes les constructions sociales autours d'eux, qui permet aux hommes de violer, aux femmes d'être soumises, aux "hommes moins virils" d'être "faibles", etc. Ce sont des dimensions sociales qui expliquent pourquoi on permet des à des gens de se classer entre eux et de passer leurs besoins avant ceux des autres. Bref, la BD illustre tout ça assez bien. Ce qui marque aussi dans cette BD est la façon d"avoir bâti certaines parties comme un documentaire, enchainant les dates et les faits comme s'ils s'étaient bien déroulés. Ces parties témoignent aussi de la logique et des causes de la débâcle "actuelle" en Chine, au moment où se déroule cette sinistre histoire. On est surtout dans les enjeux démographiques, mais aussi dans les moeurs chinois, dont l'un est malheureusement véridique: le fait d'avoir 11 hommes pour une femme en 2020 est le résultat de la politique de l'enfant unique, n'ayant plus cours actuellement, mais qui a engendré un monumental féminicide de masse, que ce soit pas abandon, meurtre ou avortement. Une des raisons est purement sociale: la fille devient la "propriété" de la belle-famille, les parents ne veulent donc pas d'un enfant qui ne pourra pas prendre soin d'eux à leur vieux jours. Donc, une part de la bd est historiquement réelle, de 1980 à 2022. Quand je parlais de constructions, en voici une édifiante. La radicalisation des femmes était prévisible, dans cette histoire. Si "le sang appelle le sang" reste un concept débattable, le fait de recalibrer la balance d'injustice sociale, elle, est tout-à-fait légitime et plausible. Cela illustre aussi une chose: Contrairement au profil établit par le patriarcat de la femme soumise, docile, stupide et porteuse de plaisir charnels, on a ici des femmes radicales, agressives, soudées, courageuses et porteuse d'une rage qui trouve ses racines dans la guerre qu'on leur livre pour leur utérus. Même physiquement, elles ont un look de guerrières aux allures punk et de gang de rue, très loin des jolies petites demoiselles chinoises qu'on est habituées à voir. Difficile, au regard de leur conditions et de leurs enjeux, de leur en vouloir d'être ainsi polarisées, il s'agit de lutter pour leur vie et leur liberté, après tout. Des vies et des libertés encore une fois placé dans les axes du sexe et du pouvoir par l'argent et la naissance. Un monde tordu qui a produit des femmes extrémistes, des hommes effacés et des salauds déshumanisants. Ce n'est pas une BD divertissante, c'est une BD engagée et qui dénonce des réalités actuelles. Le commerce du corps féminin existe. L'homme soumis existe. La guerre des sexes existe aussi. Oui, le cadre est nouveau, mais les enjeux n'en sont pas moins vraisemblables. Au fond, l'auteur a simplement poussé plus loin ces enjeux, comme Margaret Atwood l'a fait avec ses servantes écarlates. On interroge l'avenir, des valeurs et des enjeux sociaux et ses potentielles dérives. C'est donc une BD qui heurte de pleins fouet et qui reste en mémoire, assurément. Pour un lectorat adulte.
Shaynning a apprécié, commenté et noté ce livre

Le défilé

Par Kouam Tawa et Marco Chamorro
(4,0)
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Incontournable Novembre 2023 Après avoir fait la connaissance des petits romans de la maison indépendante Voce Verso, me voici en tête-à-tête avec l'un des deux romans graphiques de format hybride parus en septembre et arrivé en sol québécois en novembre, "Le Défilé", écrit par un auteur camerounais. Je ne sais pas très bien dans quel pays nous sommes, puisque le seul drapeau qu'on y voit pourrait être celui du Sénégal, même si en raison des couleurs oranges et gris ce ne sont pas les bonnes couleurs, et que dans l'histoire, nous avons le passage: "Ils avaient été des "tirailleurs sénégalais" même si nous ne sommes pas sénégalais". Donc, on est quelque part en Afrique, probablement pas loin du Sénégal ou dedans, mais avec une famille d'origine d'un autre pays africain. Le livre s'ouvre sur un décor de ville animée, où les motifs des vêtements sont riches, les fruits tropicaux et les rues grouillantes de vie. Dans ce décor, on y voit aussi un homme vendre sur son étale des jouets en forme de char d'assaut et des armes à feu en bois, pour les enfants. Cette effervescence est due à la fête de la jeunesse dont notre jeune narrateur prend part ce jour-là. Il a revêtu ses beaux habits, ciré ses chaussures et fait un petit défilé devant son grand-grand-père, avant de faire le défilé. C'est ainsi chaque année. Ce qui va diverger cette année-là est que ce même grand-grand-père va aussi prendre part à un défilé, et pas le moindre. Désormais doyen des vétérans, le grand-grand-père a donc l'honneur de défilé en tête de cortège. Cinquante ans ont passé depuis que l'homme a participé à la seconde guerre mondiale en tant que "tirailleurs sénégalais". Dans son coffre en fer, il y a son uniforme, ses médailles et surtout, des souvenirs. À une époque, lui et ses compatriotes ont certes œuvrer à combattre le mal, le pays aussi a participé à l'effort de guerre. Pour le jeune narrateur, cet hommage à la paix change son regard sur la guerre. Bon, déjà, je suis ravie de voir un livre sur la seconde guerre mondiale qui traite de la perceptive africaine. L'arrière-grand-père du narrateur a servi dans les forces de la 2e division blindée formée par le général Leclerc au Maroc, contribuant à la libération de Paris ( entre autre chose). On oublie beaucoup trop de parler de la contribution du continent africain dans les deux conflits mondiaux. Ici, on n'est pas dans les évènements à proprement parlé, mais dans le devoir de mémoire auprès des vétérans, des soldats morts au combat et des efforts de guerre des nations. En somme, nous sommes dans la commémoration des conflits mondiaux. Voilà un axe rare en littérature jeunesse. Dans le roman, nous avons dans les scènes graphiques divers aspects de ces souvenirs, notamment cette séquence avec des soldats en pleine action, suivie directement d'envolée de corbeaux, probablement en train de se nourrir de ces même soldats ( mais on ne voit que les oiseaux). Les pages 44-45 montre le haut du visage du grand-père, les yeux fermé, entouré de plis et de rides soucieuses et tristes. Probable que le vieil homme se souvient. L'aspect entre les générations est très intéressant, entre le jeune homme faisant la guerre pour la paix, tandis que son arrière-petit-fils est enfant de paix jouant à la guerre. Le narrateur s'était même acheté des jouets sous forme de grenade, char et fusils pour y jouer, sous le regard déçu et peiné de son aïeul. Maintenant qu'il voit le défilé, la signification qu'il revêt, le jeune narrateur comprend mieux. Dans l'Histoire de son pays, il y a des hommes qui ont perdu la vie pour combattre le mal, pour ramener la paix. En clair, son grand-grand-père est un héro, loin du vieil homme tranquille et oisif qu'il a toujours connu, tant et si bien qu'il s'est défait de son char, sa grenade et son fusil, a écouté les histoires de son aïeul et ensemble, "ont joué fièrement à la paix le reste du soir". J'aime bien cette histoire courte, mais néanmoins porteuse, qui inscrit une réalité historique dans un présent de paix d'un enfant, surtout un enfant qui ne semble pas comprendre la porté d'une véritable guerre. J'avais déjà lu quelque part que les humains ayant connu la guerre connaissent la valeur véritable de la paix, alors qu'au contraire, il peu y avoir une tendance aux humains n'ayant connu que la paix de minimiser les impacts d'une guerre. C'est pourquoi le devoir de mémoire est si important, d'ailleurs. En outre, si la guerre est odieuse et que personne ne mérite de la vivre, reste que paradoxalement, les gens qui ont le courage d'y prendre part pour l'enrayer mérite, eux, le respect et la gratitude. Il y a eu des millions de gens qui sont morts d'avoir combattu un groupe aussi bien terroriste que radical, qui avait des vues sur le monde. Des soldats, mais aussi des civils, en témoignent leur effort et leurs contributions. Côté graphique, nous avons une palette en clair-obscure au plomb dont la seule couleur admise est un jaune orangé. Les mains des personnages sont souvent grandes, les vêtements rempli de motifs et il y a un travail de hachures dans les textures. Le graphique occupe parfois de pleines pages, voit plusieurs de suite et sert parfois la narration elle-même. Autrement dit, le texte ne dit pas tout, ce sont les illustrations qui "parlent". Côté texte, ça se lit très bien, c'est sobre sans perdre de profondeur. Je pense que ça permettra aux lectorat du 2e cycle primaire, les 8-9 ans, de pouvoir le lire sans problèmes. J'ai souvent des jeunes lecteurs de ce groupe d'âge qui s'intéresse aux conflits mondiaux, alors en voilà un qui devrait le servir. Certes, on ne parle pas du conflit lui-même, mais de sa portée dans le temps et de la considération que nous avons envers les acteurs qui y ont prit part à l'époque. Aussi, le fait d'avoir un bon support graphique me semble un beau complément pour ce lectorat. Reste que le cursus scolaire aborde les conflits mondiaux davantage au 3e cycle primaire, d'ordinaire. Un hybride roman-album fort pertinent, rare fenêtre sur l'Afrique pour la littérature jeunesse, qui met en lumière une relation entre un arrière-grand-papa et son arrière-petit-fils, dont les bénéfices de la vente du livre seront reversés à l'ONG "Bibliothèques Sans Frontières", qui "facilite l'accès des populations vulnérables à l'éducation, à la culture et à l'information, dans plus de 30 pays" ( Tel qu'écrit sur la 4e de couverture). Pour un lectorat intermédiaire, à partir du 2e cycle primaire, 8-9 ans+
Shaynning a apprécié et noté ce livre

L'étoile du soir

Par Siècle Vaëlban
(5,0)
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Opération Eiche

Par Camille Bouchard
(4,0)
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Un mot: Ayoye! J'aimerais dire que c'était une sorte de comédie cette invraisemblable Opération militaire allemande, mais c'est ce qui en fait quelque chose de drôle: Son côté totalement rocambolesque. S'ajoute à cette fresque un trio totalement hors-contexte et témoins improbables de cette débâcle-miracle, et cela vous tirera certainement un sourire...ou deux. Tomasso, son incompétent de chien berger, Achille, et son ami un peu simplet, Niccolo, sont en quête d'un mouton égaré quand ils aperçoivent au-dessus d'eux un escadron d'avions nazis en silence complet. Ces avions planeurs se dirigent vers le Campo Imperator, un hôtel où une centaine de soldats italiens tiennent caché l'homme le plus détesté des habitants en cette année 1953, le dictateur déchu, Mussolini. Quand la nouvelle de la déchéance de son ami et père du fasciste lui parvient, Adolf Hitler pique une de ses crises de colère légendaires, invective les italiens, promet de sévères réprimandes ( entre autre de capturer le pape) et exige qu'on libère son idole sur-le-champs. Ainsi est mise en branle l'Opération Eiche, sous le commandement de Otto Skorzeny, homme d'action aux grandes ambitions, qui voit là l'occasion de gravir les échelons. Ce qu'il ignore, c'est qu'il devra retenter cette opération par quatre fois, qu'un de ses planeurs allait rater son atterrissage parce que l'un de ses patins s'est fiché dans le crâne du mouton de Tomasso et que même si le seul coup de feu qui sera tiré sera un accident, on trouvera à travers le bazar aérien et deux factions ennemis le moyen de réussir à sauver le Duce sans tuer personne. En parallèle, Tomasso et ses deux acolytes tenteront de se faire dédommager l'animal à travers le bazar en question. Un strudel avec ça? J'aime toujours autant la façon surprenante de monsieur Camille Bouchard de traiter la narration. Ce qui aurait pu n'être qu'une opération militaire particulièrement hasardeuse et pourtant fort chanceuse devient presque une pièce de théâtre comique. Avec le ton caustique et un brin moqueur de Tomasso, l'insistance sur certains traits des personnages et la nonchalance des civiles qui côtoie l'urgence des militaires, y a pas moyen de prendre tout ça au sérieux. Surtout avec la chute finale, celle au sens figuré et celle au sens littéral. Petit roman sur un petit épisode déjanté de la seconde guerre mondiale, servi en tranches courtes, "Opération Eiche" est le roman le plus surprenamment léger que j'ai lu sur cette période trouble de l'histoire mondiale. Ni morts, ni torture, ni massacres, pas l'ombre d'une bagarre, on y retrouve juste beaucoup de cris, de mouvements et d'avions - Avec 3 témoins qui font tâche - dont un cadavre de mouton trainé sur les épaules de Tomasso. Il y a quelque chose de jouissif à penser que Mussolini, si superbement imbu de lui-même, qui s'est évertué à nourrir un véritable culte de sa propre personne de la part de son peuple, père du fascisme, dictateur sans pitié et meilleur ami d'un autre dictateur tout aussi déraisonnable, ait été réduit à l'état de prisonnier devant se faire sauvé les fesses par un homme pas plus vertueux que lui. On voit un peu de cette déchéance, cette image fracturée, loin des photos en contre-plongés , de la propagande et des dialogues dégoulinant de narcissisme de mâle dominant. Ils auront beau bouder la réalité comme il veulent les dictateurs, elle finira toujours par leur revenir en pleine tronche. Et pas de la plus élégante des manières, L Histoire nous le dit. J'ai trouvé le français très européen, avec des tournures de phrases que je lis davantage de la France, notamment le récurrent mot "couillon", qu'on emploi pas vraiment en francophonie américaine. En même temps, comme on est en sol européen, ce serait cohérent. Les titres des soldats et noms d'unités sont dans leur langue allemande. Enfin, il y a présence de termes italiens également, mais tout se comprend très bien et des traductions arrivent parfois de la part des personnages. Une autre lecture étonnante et historiquement inspirée de faits réels pour le productif auteur québécois. Pour un lectorat adolescent, 1er cycle secondaire, 12-15 ans **Pour les bibliothécaires et profs: Il y a quelques vilains mots ( en allemand surtout), mais rien de très méchant.
Shaynning a apprécié, commenté et noté ce livre

C'est pas juste dans ta tête

Par Virginie Cloutier-Naud
(4,0)
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Incontournable Documentaire Ado Mai 2023 La maison Les Malins commence à développer ses documentaires un peu plus. Nous connaissons leur "ABC des filles' et leur "Gros livre épais" ( pour les gars), qui reviennent en boucle chaque année, mais récemment, j'ai trouvé ce livre-ci. "Pas juste dans ta tête" traite d'anxiété, l'émotion, mais aussi ses sources, ses manifestations et ces conséquences quand elle devient envahissante. Dans sa forme, il n'est pas complètement neutre comme les docus traditionnels. Une part est attachée au vécu de son autrice. Ce peut être intéressant pour apporter un angle personnel et plus complice en terme de narration. J'apprécie néanmoins que le volet information soit plus neutre, car il relève alors de faits, non pas d'interprétation. L'autrice emploie un ton amical, ponctué parfois d'anecdotes, et se sert du tutoiement, ce qui rend le tout moins formel et moins froid. Surtout, ce qui me semble être une grande force dans l’œuvre est l'impression que le livre est vraiment conçu et pensé pour le lectorat adolescent, non pas adulte. Le documentaire jeunesse adolescent est jeune dans la famille documentaire jeunesse et je déplore cet fait. Les ados ne sont pas des adultes. Je ne dis pas cela pour les infantiliser, c'est une simple question de développement . Je pense que le "traitement" des œuvres est donc à peaufiner pour mieux se coller à leur groupe d'âge. Par exemple, penser à vulgariser les concepts, pour mieux adresser l'information à des 12 à 17 ans, encore scolarisés et encore peu expérimentés dans certains domaines. Aussi, penser à parler des enjeux de leur groupe d'âge, qui sont très souvent différents que pour les adultes et s'ils sont similaires, peuvent se traduire différemment. L'anxiété est un bon exemple, car d'un strict point de vue de développement biologique, psychologique et social, nos ados sont dans un groupes différent des adultes. Ils sont aussi à l'âge des premières fois à bien des égards, leur perception seront donc différentes de l'adulte habitué et expérimenté. Enfin, d'un point de vie d'intérêts et de réalité sociale, ils sont d'une génération différente. Bref, tout ça pour dire que je suis ravie de voir des livres tenir compte des ados en tant que groupe d'âge et de mieux tenir compte de leur besoins, ce qui les intéresse et ce qui les concerne. C'est bien plus important qu'on le croit. Dans le présent livre, plusieurs aspects m'ont plus. Je suis d'abord ravie de voir une rubrique traiter de la différence entre introversion on et extraversion. Si nous ne sommes ni tout l'un, ni tout l'autre, reste que nous avons une prédominance de l'un par rapport à l'autre, qui peut fluctuer légèrement dépendamment de certains facteurs. Pourquoi est-ce pertinent d'en parler ici? Parce que le monde occidental est généralement à la faveur des extravertis, considérés comme "plus sociables", "plus audacieux" et globalement perçus comme des meneurs. Déjà, c'est faux, ce sont des traits spécifiques, que peuvent donc avoir les introvertis, mais surtout, on tend à mettre la pression sur les introvertis à se reformater dans l'extraversion, comme si on pouvait aisément changer un trait de tempérament. Les pousser à avoir de gros groupes d'amis, de sortir souvent, de cultiver leur image, bref, tous ces aspects associés aux extravertis ( que ces derniers n'ont pas forcément non plus, d'ailleurs). Cette dynamique de perceptions et de pression sociale peut devenir une source de stress et joue sur l'anxiété. Aucune personne ne devrait se faire pousser, directement ou pas, à changer de tempérament. Savoir ce que sont réellement l'introversion et l'extraversion, qui n'ont rien à voir avec les traits sociable, meneur ou audacieux, mais bien avec la stimulation et l'énergie, permet de mieux comprendre la dynamique sociale autours de ces deux pôles. Et surtout, de mieux se connaitre. Parmi les autres éléments fort pertinents, nous retrouverons de plus amples explications sur les formes d'anxiété, comme l'écoanxiété, l'anxiété de performance ( un grand mal dans les écoles de tous niveaux) ou encore le trouble d'anxiété généralisé ( communément appelle "TAG"). On aborde ses composantes, ses manifestations, ses conséquences et surtout les moyens pour mieux la gérer. J'aime énormément le fait qu'il est clair dans le livre qu'il ne faut pas non plus tomber dans le panneau de devenir anxieux " à essayer de gérer son anxiété", ça revient à faire de l'anxiété de performance, mais sur l'anxiété elle-même! On ne peut PAS complètement se prémunir de l'anxiété et ce , pour une raison toute simple: C'est une émotion. Il est impossible d'être jamais triste, en colère ou joyeux, pas plus que de ne jamais être anxieux. Et l'autre grande vérité, celle que des gens continuent de dénier, c'est le fait que TOUT LE MONDE vit de l'anxiété. Certes, à des niveaux variables, dans des formes variables, mais à moins d'un trouble ou d'une anomalie neurochimique, tout le monde vit de l'anxiété, tous les genres, toutes les ethnies, toutes les classe sociales, tous les types de personnalités. TOUT le monde. Anxiété et stress sont également deux concepts distincts, et ils ont leur fonction propre, on l'abordera dans le livre. Pour reprendre l'allégorie courante à leur sujet: "Quand la menace est devant toi, c'est un stress, quand la menace est dans ta tête, c'est de l'anxiété", avec souvent comme exemple de menace le mammouth. Drôle d'exemple, mais toujours cocasse à entendre. Dans le monde de l'intervention psychosociale, on parle souvent de "facteurs de risque" et de "facteurs de protection". Il en sera question ( peut-être pas dans ce deux termes là, mais je paraphrase ici). L'hygiène de vie, la gestion des réseaux sociaux, les sphères sociales, les activités physiques, les rêves et aspirations, les modèles ( au sens social), l'éducation, les besoins primaires ( sécurité, nourriture, toit, santé) et la scolarisation ( associé aux connaissances générales et aux perceptives d'avenir) constituent, selon leur degré de présence ou non, des facteurs de protection ou de risque. Ils n'induisent pas d'anxiété, ils influencent l'anxiété, nuance. Un facteur de risque ou de protection ne sont pas des causes, ils restent dans l'ordre de la possibilité de nuire ou d'aider. Et là je place un ingrédient majeur abordé dans le livre qui devrait être abordé beaucoup plus dans les écoles dès le primaire, l'estime de soi. C'est le pilier de notre santé mentale et de notre perception de soi. Une bonne estime de soi implique aussi d'avoir confiance en soi, de s'estimer, se reconnaitre sa valeur, de reconnaitre ses besoins et ses limites. Donc, inévitablement, il faut parler d'estime de soi quand on parle d'anxiété, elles peuvent être étroitement corrélées, même si bien sur, les facteurs de risque et de protection ont leur part d'influences. Dernier point, comme le titre l'indique, "c'est pas juste dans la tête". Être anxieux n'a rien d'une folie ou d'un cas isolé, encore moins d'une faiblesse ( j'emmerde la masculinité toxique, les coachs de vie et tout ceux qui prétendent le contraire!) . Qui plus est, il faut aussi comprendre que l'anxiété vient avec des conséquences somatiques, c'est-à-dire qu'elle génère des réactions physiques qui peuvent devenir perturbantes, donc "pas juste dans la tête". Maux de ventre, crises panique, problèmes de sommeil, sueurs froides, etc. Il existe une large palette de réactions physiologiques liées à un excès d'anxiété et encore une fois, c'est normal, les autres émotions aussi viennent avec des réactions physiques. S'ajoute à ce tableau fort complet des illustrations, souvent cocasses, des tableaux et des appuis. Graphiquement, ça ressemble à un mélange de revue et de périodique. J'aime la mise en page et la structure pour cette raison. Vous trouverez aussi des infos pertinentes, notamment la bibliographie et les numéros des organismes d'aide à la fin. Je suis donc vraiment contente qu'on se penche à la fois sur la cas d'une émotion très mal connue et du documentaire ado en une fois. J'espère en voir pousser d'autres sur d'autres enjeux, de manière aussi complète, pour nos ados. Ce ne sont pas les sujets qui manquent et nos profs comme nos parents sont également en quête d'idées de lecture pour leurs ados sur des sujets comme la psycho, la société ou encore les enjeux sociaux. Petit ajout qui pourrait néanmoins être intéressant à ajouter dans ce genre de livre: des témoignages. On illustrerait ainsi mieux la réalité terrain des ados, et surtout, la diversité liées aux personnalités, aux situations socio-économique et aux profils culturels. La diversité, on en a jamais assez! Pour un lectorat adolescent, à partir du 1er cycle secondaire, 12-15 ans+** **Je pense que même les 10-12 ans peuvent y trouver de très bons éléments.