Pendant deux siècles et demi, de 1603 à 1868, le Japon fut
dirigé par le clan militaire des Tokugawa et ses shôgun. L'orthodoxie
néo-confucianiste lui sert alors de doctrine officielle.Ce monde n'est pourtant pas immobile. Au XVIIIe siècle, des
intellectuels entreprennent de reconsidérer tout le fonctionnement
de la société humaine. Le stock de mots et d'idées dont ils héritent
provient de courants fort divers : bouddhisme, taoïsme, légisme,
confucianisme, shintô, études nationales.Ces penseurs vont le réinterpréter de manière vertigineuse,
totalement «désenchantée». Certains affirment le caractère
inéluctable, voire positif, des passions individuelles. D'autres
considèrent les normes comme des inventions humaines, la société
comme un réseau de relations contractuelles, la raison comme
un instrument de critique et de calcul. D'autres encore valorisent
la compétition, le risque et l'échec, l'intimité, la vie privée et la
responsabilité individuelle.Comment des idées aussi «modernes», si semblables à celles
qui rendirent possible en Occident la constitution des théories
politiques, ont-elles pu apparaître dans une société largement
féodale, une sorte de dictature militaire encore épargnée par tout
contact approfondi avec l'Occident ?
Pendant deux siècles et demi, de 1603 à 1868, le Japon fut
dirigé par le clan militaire des Tokugawa et ses shôgun. L'orthodoxie
néo-confucianiste lui sert alors de doctrine officielle.Ce monde n'est pourtant pas immobile. Au XVIIIe siècle, des
intellectuels entreprennent de reconsidérer tout le fonctionnement
de la société humaine. Le stock de mots et d'idées dont ils héritent
provient de courants fort divers : bouddhisme, taoïsme, légisme,
confucianisme, shintô, études nationales.Ces penseurs vont le réinterpréter de manière vertigineuse,
totalement «désenchantée». Certains affirment le caractère
inéluctable, voire positif, des passions individuelles. D'autres
considèrent les normes comme des inventions humaines, la société
comme un réseau de relations contractuelles, la raison comme
un instrument de critique et de calcul. D'autres encore valorisent
la compétition, le risque et l'échec, l'intimité, la vie privée et la
responsabilité individuelle.Comment des idées aussi «modernes», si semblables à celles
qui rendirent possible en Occident la constitution des théories
politiques, ont-elles pu apparaître dans une société largement
féodale, une sorte de dictature militaire encore épargnée par tout
contact approfondi avec l'Occident ?