
Robert Allie
Intérêts littéraires :
Littérature, Bande dessinée, Voyages, Essais, Faune/Flore
Activités de Robert Allie

Hillary Rodham Clinton et Louise Penny ont rédigé ensemble «État de terreur» (2021/2022), un thriller politique international. La proposition de coécrire un roman est d'abord venue de l'éditeur d'Hillary Clinton qui voulait reproduire ce que Bill Clinton et James Patterson avaient fait (deux romans policiers). Dès l'annonce de cette collaboration, j'avais hâte de lire ce roman parce que je connaissais les romans policiers de Louise Penny. Puis, après avoir lu «Pour rien au monde» de Ken Follet, un thriller politique du même genre, je souhaitais d'une certaine façon, comparer les deux.
Dans «État de terreur», Ellen Adams est la nouvelle Secrétaire d'État des États-Unis suite aux plus récentes élections qui ont entraîné un changement de gouvernement. La nouvelle administration du Président Williams succède à celle d'Eric Dunn, un politicien incompétent qui a semé le chaos dans l'appareil gouvernemental, mais surtout dans les relations diplomatiques des États-Unis (une sorte d'hommage à Trump ici). D'autre part, les analystes politiques n'ont pas compris la nomination d'Adams puisqu'elle est une adversaire du Président Williams. D'ailleurs, elle ne s'entend pas très bien avec son président et ce dernier la nommer pour tenter de l'humilier et de la détruire politiquement. Malheureusement pour lui, son entreprise de destruction est mise à mal suite à une série d'attentats meurtriers à Londres, Paris et Francfort. Une agente du Service extérieur du secrétariat d’État, Anahita Dahir, reçoit d’une source anonyme un message crypté qu'elle interprétera comme étant lié aux attentats. La panique s'empare des organisations antiterroristes américaines et internationales.
S'engage alors une chasse aux informations. La Secrétaire d'État se rend dans différents pays plus ou moins alliés, pour trouver des renseignements et éventuellement en donner. On cherche surtout à éviter le prochain attentat. Ellen Adams est notamment accompagnée de sa vieille amie dont elle a fait sa conseillère, de sa fille et également en parallèle par son fils qui a été blessé lors d'un des attentats. La quête d'information se fait quasiment sous la forme de quiz, de rebut ou de devinette... Quels mots retenir de la conversation, que voulait-il dire par..., que signifie ces chiffres... Le Pakistan, l'Iran, l'Afghanistan et la Russie sont au cœur du conflit, mais derrière tout cela il y a un homme terrifiant, Bashir Shaw, un vendeur d'armes dont la Secrétaire d'État est une ennemie personnelle. Adams est d'ailleurs convaincue que c'est Shaw qui a empoisonné son mari. Curieusement, Shaw connaît tout les déplacements de la Secrétaire d'État et même le contenu de ses conversations avec les chefs d'État. Y a-t-il des traites dans la salle? On sent le retour d'une sorte «d'axe du mal» qui prend la forme d'une alliance de malfaiteurs internationaux qui ne travaillaient pas nécessairement ensemble. La mafia russe dirigée par Maxim Ivanov, le président de la Russie, le vendeur d'armes Bashir Shaw, les martyrs d'al-Qaïda et l’extrême droite américaine! Le lecteur est conscient de ce terrorisme intérieur américain que tard dans le roman. Finalement, les bombes qui devaient exploser aux États-Unis dans le but de renverser le gouvernement seront désamorcées à la dernière seconde...
Pour tout vous dire, j'ai été un peu déçu, probablement que mes attentes étaient trop grandes. Nous sommes tout de même en face d'un très bon thriller politique puisqu'à chaque chapitre le lecteur veut connaître la suite. Il y a des liens avec la réalité géopolitique d'aujourd'hui, il y a plusieurs personnages intéressants au cœur de l'intrigue, un peu d'humour et des personnages féminins forts. Le fait que ce roman soit écrit par deux femmes transparaît dans tout le roman, l'attitude mesquine des hommes et la misogynie ambiante y sont soulignées. Oui, le lecteur aime pouvoir se dire que cela pourrait arriver même s'il ne le souhaite pas. J'ai aimé que Clinton et Penny choisissent la montée de l'extrême droite des suprémacistes comme trame de fond de toute l'affaire parce qu'il s'agit là de quelque chose de plus insidieux qui gangrène l'ensemble de la société.
En ce sens, j'aime mieux ce choix que la menace nucléaire de Ken Follet. Il y a moins de morts dans «État de terreur» que dans «Pour rien au monde». L'intrigue de Clinton et Penny est plus subtile, plus intellectuelle et fait encore plus appel à la diplomatie. Les forces militaires y prennent un peu moins de place. Tout comme j'ai été un peu agacé par le volet «James Bond» du roman de Follet, l'omniprésence de la fille et du fils de la Secrétaire d'État enlève un peu de crédibilité au récit de Clinton et Penny. Ça demeure du bon divertissement, bien écrit et jusqu'à un certain point «éducatif». Elles ont déjà signé pour en faire un film...

«Là où je me terre» (2020) de Caroline Dawson est présenté comme un roman d'autofiction, pour ma part je dirais plus qu'il s'agit d'un récit en plusieurs petits chapitres sur 200 pages. Chapitres dont les titres sont des références typiquement québécoises comme «La Liberté n'est pas une marque de yogourt» ou «Mme Brossard de Brossard», un signe de l'intégration de Caroline Dawson et surtout de son chapeau de sociologue. Elle sait décrire la société dans laquelle elle vit.
Elle nous raconte son parcours de réfugiée chilienne de son enfance jusqu'à sa vie adulte. Dès leur arrivée, l'hiver québécois et montréalais occupe la place qui lui revient, pour de nouveaux arrivants du Sud l'hiver est une épreuve, ses parents vont tenter de demeurer reclus à l'intérieur autant que possible. L'enfant puis l'adolescente est bien consciente de l'abnégation dont font preuve ses deux parents en travaillant tout le temps dans des emplois de misère, comme faire des ménages. Elle comprend la place que sa famille et elle-même occupent, une conscience de classe qui entraîne des comportements différents.
Caroline nous raconte également ce qu'elle-même doit faire pour s'harmoniser avec son nouvel environnement. Apprendre la langue, les références télévisuelles et surtout atténuer les différences; ses vêtements, ses lunchs et même sa façon de bouger, mais elle ne peut pas changer la couleur de sa peau et ses grands cheveux noirs, quoi que sa mère se soit teint en blonde... Elle comprend aussi qu'elle doit réussir pour répondre aux sacrifices de ses parents. Tout cela ne se fait pas sans douleur, pensez-y, renoncer à qui vous êtes pour pouvoir prendre votre place, il semble y avoir là une contradiction.
Caroline va compléter un parcours scolaire impeccable, devenir professeur de sociologie au Cégep, fonder une famille avec un conjoint médecin, son statut social est enviable. Elle sera bien malgré elle «un ostie de modèle d'intégration», elle connaît le prix à payer, l'humiliation, la santé, des rêves et des vies gâchées pour en sauver d'autres...
Elle partage son quotidien de réfugiée de façon assez directe, mais avec humour. Elle utilise un langage accessible pour être comprise par le plus grand nombre, on sent la volonté de faire passer le message. L'immigration nous est rarement présentée de cette façon, de ce point de vue, toute la gamme des émotions s'y trouve. J'ai notamment été touché par le passage où elle quitte un party quand elle se rend compte que c'est sa mère qui viendra faire le ménage le lendemain dans cette maison de riche...

Pour rien au monde
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Ken Follett, «Pour rien au monde» (2021), une brique de 778 p., un thriller politique autour du recours ultime à l'arme nucléaire. Pourquoi les chefs d'État finiraient-ils par utiliser l'arme nucléaire même si «pour rien au monde» ils ne voulaient y avoir recours. Follet tente ici de mettre en place un scénario probable en considérant ce que nous connaissons des enjeux internationaux actuels.
De façon générale, les différents chapitres du roman nous transportent sous trois lieux différents imbriqués les uns dans les autres. Nous sommes aux États-Unis avec la présidente Pauline Green et son entourage. On passe par l'Afrique du Nord et plus particulièrement au Tchad ou Tamara et Ted, deux agents des services secrets de leur pays respectif, les États-Unis et la France, traquent les Djihadistes en suivant notamment Abdul et Kiah. Puis on se retrouve en Chine, avec Chang Kai, vice-ministre du renseignement extérieur, qui fait partie du gouvernement du président Chen.
Il y est donc beaucoup question d'espionnage, de contre-espionnage, d'alliance et de diplomatie. Les portions se déroulant aux États-Unis et en Chine, nous font voir des présidents qui pèsent le pour et le contre en écoutant les «colombes» et les «faucons» de leur gouvernement respectif. Par contre, en Afrique, nous sommes plus dans une trame du type «James Bond» ou «Mission impossible», j'y vois un certain déséquilibre, mais ce n'est pas trop grave. On dirait que c'est peut-être placé là pour laisser respirer le lecteur.
Un roman divertissant, un bon thriller, plaisant à lire, inquiétant certes, mais de nos jours l'anxiété environnementale est plus grande que l'anxiété nucléaire, nous ne sommes plus dans la période de la guerre froide avec l'URSS.

J’ai complété la lecture de L’Anomalie (2020) de Hervé Le Tellier il y a quelque temps déjà. Je n’avais pas eu le temps de compléter mes commentaires… je vous les transmets presto! Hervé Le Tellier a plus de 20 titres à son actif, mais on le connaît peu, mais c’est un original.
Il est difficile de parler de l’histoire de ce roman sans brûler le plaisir du lecteur. Alors, je vous dirai seulement qu’il est question d’un vol d’Air France Paris-New York, avec 243 voyageurs à bord qui échappent de justesse à un écrasement en traversant une tempête. Puis le narrateur nous parle de quelques-uns de ces passagers...
Pour moi, «L’anomalie» est un roman dont l’écriture ressemble à un scénario de film. C’est bref, punché, ça touche aux enjeux de société d’actualité et il y a des personnages variés pour plaire à tout le monde. Le défaut de cette façon de faire c’est qu’il est difficile de développer l’histoire et le caractère des personnages et de nuancer les enjeux soulevés. Il y a des personnages plus faibles ou moins crédibles que d’autres. Il faut croire que l’imaginaire et le propre point de vue du lecteur comblent cette lacune puisque je ne l’ai pas ressentie à la première lecture.
Quant aux enjeux soulevés, il les aborde parfois avec humour et parfois avec ironie et/ou sarcasme. Il est question de désinformation, de populismes, d’homophobie, des conditions des minorités voir de racisme, de la globalisation de l’économie, de l’envahissement des technologies et même du pouvoir malsain des religions. Ce qui permet également à l’auteur d’aborder la science (et son rôle), la théologie et la philosophie. C’est beaucoup pour un seul roman, c’est pourquoi, par exemple, un de ces enjeux peut être évoqué dans une «scéne», puis il n’en est plus question par la suite, mais l’auteur a tout de même semé une graine dans votre esprit...
C’est un roman original et la qualité de l’écriture est indéniable. L’auteur joue avec les styles et le rythme puisque le roman débute comme un thriller, on passe à la science-fiction tout en abordant brièvement le roman d’aventures et le roman d’amour à l’eau de rose.
Quoi qu’il en soit, «L’anomalie» pousse à la la réflexion par son thème principal, mais aussi via tout ce qu’il aborde en utilisant la vie des personnages. J’ai bien aimé ce roman. Je le recommande aux esprits curieux et ouverts.

Le mal du Nord
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Bizarre incident du chien pendant la nuit (Le)
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Le vieil homme et la mer
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Coule la Seine
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L'assommoir
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«La ville analogique» - Repenser l’urbanité à l’ère numérique (2022) de Guillaume Ethier, un court essai de 90 pages dans la série «Documents» des Ateliers 10. Je vous recommande ces essais portant sur les enjeux sociaux de notre époque.
Ici, la ville analogique, c’est l’utopie qu’Ethier met de l’avant en lien avec la cité numérique et la ville intelligente. Il souhaite une «conversation» entre ces trois concepts. À la base, il a réalisé comme nous tous que la vie numérique connectée c’est bien, mais ce n’est pas suffisant. L’humain a besoin de se connecter à d’autres humains, à l’espace et aux vivants.
Sa ville analogique, il lui attribue quatre qualités auxquelles elle doit aspirer; elle doit être lente, tangible, intime et imparfaite. La lenteur s’exprime d’abord en opposition à la vitesse de notre expérience de la connexion, tout va vite, nous sommes partout en même temps, toujours présent. Il nous invite à nous débrancher, on vit mieux la lenteur de cette façon. Il mentionne la place de la nature, la recherche de la qualité de vie plutôt que le développement urbain (entendre immobilier). Il faut implanter des lieux d’arrêt qui permettent l’interaction entre humains.
La voilà tangible, la ville analogique doit favoriser les contacts. Il mentionne à titre indicatif la distance entre les bancs qui permets la conversation si elle est souhaitée ou de rester dans sa bulle. Il souligne également l’aspect interactif, l’appel aux sens, pensons au piano piétonnier, aux balançoires musicales ou simplement une fontaine avec des lumières.
Il la souhaite aussi intime parce que les sphères publique et privée de nos vies sont en mutation. Après une journée de télétravail à la maison, la personne qui sort prendre une marche est plutôt à la recherche d’une intimité relative, la sphère privée se déplace en terrain public. Ethier envisage des lieux plus petits, des bulles où l’on pourrait laisser notre esprit vagabonder. Nous sommes ici à l’échelle du quartier, il parle d’ancrage pour nommer ces espaces. Par contre, il inclut ici l’importance de la vie de quartier, le voisinage, les cours intérieures.
Finalement, il lui donne le droit d’être imparfaite. Les citoyens nous étonnent toujours par les usages qu’ils peuvent faire d’un terrain vague ou d’un entrepôt abandonné. Il faut prendre le temps d’analyser ce qui s'y passe avant d’interdire, de barricader et de clôturer. Il est possible d’expérimenter, de faire des erreurs dans la recherche de la ville analogique. Il termine en nous disant «Allez jouer dehors!»
Un essai qui stimule la réflexion avec un côté universitaire qui peut rebuter.

Guide photo des oiseaux marins du monde
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Il est question dans ce guide des oiseaux pélagiques. Il s’agit des espèces d’oiseaux qu’il est possible d’observer au large, donc en général à partir d’un bateau en mer. En principe, vous n’y trouverez pas de limicoles et d’oiseaux de rivage. Ainsi, les auteurs ne font mention que de quatre espèces de Goélands, trois espèces de Sternes et deux espèces de Phalaropes, vous n’y trouverez pas de Cormorans. D’autre part, bien que ce guide puisse être fort utile pour appuyer le «Seawatching», ce n’est pas son but.
Ce guide représente en soi un exploit remarquable, il contient plus de 2200 photos toujours sur un fond bleu ou gris permettant de comparer plus de 270 espèces en les présentant sous le même angle et dans la même position en vol. Les auteurs y ont aussi ajouté pour de nombreuses espèces les différents plumages liés à l’âge et à la mue des oiseaux (p.296-297 pour les Fous de Bassan).
Howell et Zufelt nous rappellent que l’observation des oiseaux en mer n’est pas facile. Ils soulignent qu’il faut humblement accepter que plusieurs oiseaux observés poursuivent leur vol sans avoir été identifiés correctement. D’autant plus que l’état de la taxonomie des oiseaux pélagiques est en constante évolution. Les auteurs avouent avoir créé des noms d’espèces vernaculaires pour répondre à leur propre besoin de classification. À cet égard, il y avait là tout un défi pour le traducteur qui mentionne avoir utilisé la version 11.1 de la liste multilingue de l’IOC (International Ornithological Congress) et quelques traductions de son cru lorsqu’il n’y avait pas d’équivalent existant.
C’est le genre de guide où il est vraiment utile de lire l’introduction et les consignes des auteurs, notamment parce que les pages sont très chargées. Le contenu pour chaque espèce présente un minimum commun. Toutefois, les espèces les plus étudiées bénéficient d’informations plus détaillées et de plus de photos. À cet égard, il n’y a que 114 cartes de répartition pour 270 espèces.
De prime abord, il s’agit d’un guide pour les ornithologues avancés qui pratiquent les sorties pélagiques en mer. Pour les amateurs qui comme moi sont plutôt débutants dans ce domaine, il s’agit là d’un premier contact avec ces oiseaux nous permettant d’en apprécier la grande diversité comme les 24 espèces d’Albatros.