Activités de Rosaly Boutin

Azélie Papineau, fille de Louis-Joseph Papineau, épouse de Napoléon Bourassa et mère d'Henri Bourassa, a tenu un journal intime pendant les quelques mois qui ont précédé son décès (1867-1868). Tenu secret pendant un siècle, il est maintenant dévoilé au public et brillamment mis en contexte par Georges Aubin et Micheline Lachance. C'est avec une sensibilité pieuse qu'Azélie consigne ses joies, ses craintes, ses espoirs et quelques anecdotes. Il s'agit d'un privilège immense aujourd'hui que de pouvoir lire les pensées d'une femme ayant vécu à cette époque. On parvient à saisir l'ampleur des dilemmes moraux qui tenaillent la diariste. Celle-ci connait plusieurs «crises» (ce qu'on suppose aujourd'hui être la manifestation de problèmes mentaux) qui la font constamment remettre en question sa valeur auprès de Dieu et de ses proches. Ce journal contribue à combler cette absence de la parole des femmes dans le discours public du 19e siècle.

Ce livre a été écrit en 1976 avec un but explicitement mentionné dès ses premières lignes : rallier les femmes à la cause féministe pour que celles-ci entrent en lutte contre les dogmes patriarcaux. Il s'agit d'un ouvrage teinté par l'urgence du féminisme des années 70 et les autrices n'hésitent pas à emprunter certains raccourcis intellectuels pour parvenir à leur fin pour démontrer l'injustice qui se trame sous l'histoire de la médecine. Si l'injustice est certes démontrée au final, appuyée par un certain nombre de sources, l'ensemble n'en demeure pas moins incomplet, bien qu'il ne prétende pas à l'exhaustivité. La rigueur intellectuelle est mise de côté au profit d'un objectif fermement avoué. L'angle d'approche de cet ouvrage est très audacieux, celui de la femme à travers l'histoire de la médecine. Le lecteur contemporain y trouve son plaisir sans pourtant pouvoir encenser tout ce qui y est présenté.

Ce livre se construit autour de la description d'images qui se succèdent les unes aux autres dans une forme qui n'est ni celle du roman, ni celle de la poésie, ni celle de l'essai. L'aspect en est fragmenté, mais la succession des images se fait dans un enchainement continu qui peint peu à peu le portrait d'une femme, d'une génération et d'une société. Ce livre plaira à quiconque est prêt(e) à se laisser déstabiliser par une forme peu traditionnelle. On se laisse rapidement entrainer par une écriture franchement audacieuse et actuelle. Annie Ernaux écrit Les années à la manière d'un peintre impressionniste, travaillant par touches qui se juxtaposent et qui finissent par créer un tableau qui traduit l'impression de l'artiste, et celle ici de toute une génération de l'après-guerre où la femme se réapproprie son corps.